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D’un Marcel à l’autre

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J « e suis né dans la ville d’Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers. » Quel beau voyage pour un écrivain que son enfance ! Qui peut faire mieux que Marcel Pagnol dans le registre de l’enfance heureuse ? Cette apparente simplicité ; quand la lecture devient sensation quasi physique, le toucher, la vue, les sons et les odeurs…, presque le goût des côtelettes cuites sous la braise dans la garrigue. L’enfance devient philosophi­e de vie qu’aucune expérience ultérieure ne pourra changer. Un déroulé d’images : les pieds nus dans les sandales, la poussière dans la cour, l’euphorie des grandes vacances. Le coup de coeur à la vue de ce poignet gracile qui te tend un bonbon. Cette grande aventure d’être soi-même à la fraction de seconde où le présent devient le passé, pas toujours simple, dont nous aurons peut-être à rougir, et avec lequel il faudra composer en le nommant « expérience ». Mais, dans le registre de l’enfance malheureus­e, le pire semble toujours à venir. Là aussi possible source d’inspiratio­n. Un écrivain passe peut-être devant ma porte et je ne le vois pas. Pour lui, la petite musique de l’enfance n’est pas heureuse. […] Pour lui, le goût est amer, le son est un bruit, la vision est l’obscurité, l’odeur une puanteur et la pensée un cauchemar. Il ne peut pas continuer, il doit continuer, il continue. Il doit marcher vite car un loup le poursuit. Dans dix ou quinze ans, c’est lui qui fera surgir un nouveau chapitre de la littératur­e de l’errance. François Testut

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