Mungi Ngomane*
« Le concept d’ubuntu nous rappelle que nous partageons la même humanité »
« Parler du concept sud-africain d’ubuntu est une bonne manière de faire connaître notre histoire dans le monde. Ici, à Paris, j’ai rencontré des personnes qui n’avaient jamais entendu parler de l’apartheid en Afrique du Sud ou de la commission Vérité et Réconciliation créée en 1995 pour recenser toutes les violations des droits de l’homme commises sous ce régime de ségrégation. Présidée par mon grand-père, l’archevêque et Prix Nobel de la paix Desmond Tutu, cette commission a oeuvré pour une justice restaurative et une réconciliation nationale. Elle avait l’ubuntu pour philosophie. L’idée derrière ce terme est parfaitement représentée en xhosa et en zoulou par le proverbe “Umuntu, ngumuntu, ngabantu” qui se traduit par : “Toute personne n’est une personne qu’à travers d’autres personnes”. Pour ma part, je le résumerais en une phrase : “Tous les êtres humains sont d’une valeur immense.” Cela veut dire que nous devons témoigner du respect à tout être humain, même si ses idées sont à l’opposé des nôtres. Le concept d’ubuntu nous rappelle que nous partageons la même humanité. Il est très ancien, mais on voit qu’à travers les siècles les humains font l’expérience des mêmes choses donc, selon moi, l’ubuntu peut nous aider aujourd’hui, que ce soit pour la question du changement climatique ou de notre comportement sur les réseaux sociaux. Quand je pense à ce que nous avons réussi à faire en Afrique du Sud depuis la fin de l’apartheid, je garde espoir.
Bien sûr, les Sud-Africains sont des êtres comme les autres et ils peuvent commettre des erreurs. On l’a vu récemment avec la vague de xénophobie contre les immigrés nigérians, qui en a contraint certains à retourner dans leur pays. Il se produit la même chose dans les États-Unis de Trump avec le mouvement contre les migrants d’Amérique centrale et latine. Cela montre que notre nation est encore jeune. Et que le concept d’ubuntu est essentiel pour notre humanité. »