Les femmes font-elles de bonnes espionnes ?
Le journaliste Rémi Kauffer revient sur quatre siècles d’espionnage au féminin et écorne au passage de nombreux clichés sur ces femmes de l’ombre dont l’Histoire se souvient à peine des noms.
Quels points communs entre Milady de Winter et Mata Hari ? Toutes deux incarnent la figure de l’espionne dans l’imaginaire collectif. Et pourtant, la première est un personnage de fiction, tandis que la seconde était incapable de glaner la moindre information, que ce soit sur un oreiller ou ailleurs. Le journaliste Rémi Kauffer part cependant de ces deux icônes pour mieux nous entraîner dans le monde des véritables espionnes. Qui aurait cru, alors que les époques passées étaient si misogynes, que des femmes aient mis leur intelligence au service de différents États dès le xvi e siècle ? Naviguant de portrait en anecdote, l’auteur analyse le phénomène de la female intelligence, terme forgé par les services secrets anglais au xvii e siècle. Ceux-ci comprennent très vite la nécessité de faire entrer les femmes dans les renseignements. Bien que physiquement plus faibles que les hommes, elles excellent dans l’art de la manipulation. Les espionnes n’auraient qu’un seul défaut : l’ambition, corollaire de leur intelligence supérieure, les pousse parfois aux faux pas. Petite déception cependant à la lecture du chapitre « Sexe, mensonge et attentats ». La réalité n’est pas à la hauteur du film Red Sparrow de Francis Lawrence, sorti en 2018, même si le diplomate français en poste en URSS, Maurice Dejean, est
« tombé dans ce sex-panneau vieux comme le monde ». Ce qui lui vaudra une plaisanterie de de Gaulle en personne :
« Alors Dejean, on couche ! »
Après avoir parcouru Les Femmes de l’ombre, la conclusion s’impose d’elle-même. Les espionnes ne sont ni meilleures ni plus mauvaises que les hommes. Bien que plus discrètes, elles ont participé à l’histoire des services secrets, mais elles sont encore trop peu étudiées car en France, selon l’auteur, les universitaires dédaignent le renseignement qu’ils abandonnent avec mépris aux journalistes. Au moins ce livre ramène-t-il les femmes de l’ombre à la lumière.