« Faute de rêves, nous mourrions »
Quel point commun entre Daniel Pennac et Fellini ? Une attention toute particulière à l’onirisme, auquel La Loi du rêveur rend un vibrant hommage.
Votre narrateur déclare écrire un livre sur « Fellini, le rêve » : était-ce aussi votre projet ?
• Daniel Pennac. Honorer mes rêves, voilà ce que j’ai fait ici. L’envie m’est venue de mêler songe, imagination et réalité dans une célébration de ce(ux) qui enchante(nt) quotidiennement ma vie. Ce livre est beaucoup plus spontané que mes autres romans, à l’exception de Mon frère. Ici, c’est la narration qui est au service de l’imagination.
Quel rapport entretenez-vous avec l’oeuvre de Fellini ?
• D.P. Je n’ai jamais rencontré Fellini, mais c’est le compagnonnage de toute une vie.
Lui dans le rôle du réalisateur, moi dans celui de l’un de ses innombrables spectateurs. De La Strada à Intervista en passant par les Vitelloni, 8 ½, Amarcord, Fellini Roma, je ne l’ai jamais quitté des yeux. Je ne me lasse pas de ses fantaisies biographiques. J’ai vu Amarcord un nombre incalculable de fois. Et puis nous avons un point commun : pendant de longues années, nous avons tenu le journal de nos rêves. Il en a fait un livre magnifique, Il Libro dei sogni.
Existe-t-il des naturels plus rêveurs que d’autres ?
• D.P. Le rêve est une fonction vitale. Rêveurs, nous le sommes tous, faute de rêves, nous mourrions. Ce qui m’intéresse, c’est l’usage que nous en faisons au réveil. Je ne soumets jamais les miens à l’interprétation. Je ne les envisage qu’en tant que sources de récits. Je les exploite éhontément sans jamais me préoccuper de leur sens. Ce qui me fascine, c’est leur effarante production d’énergie narrative. J’attends les miens à la sortie, si je puis dire. J’y descends au coeur du suspense et essaie d’en tirer tous les prolongements anecdotiques imaginables.
★★★☆☆ LA LOI DU RÊVEUR PAR DANIEL PENNAC, 176 P., GALLIMARD, 17 €