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Dévorer les vivants

Usant de la métaphore du cannibalis­me pour évoquer la relation mère-fille, livre une fascinante chronique adolescent­e.

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HHHII

OGRESSE PAR AYLIN MANÇO,

278 P., SARBACANE, 16 € (DÈS 13 ANS)

QAylin Manço

ue présagent cette fourchette et cette tache de sang illustrant la couverture du roman Ogresse ?

« Hier soir, Maman m’a fait manger du coeur. » La première phrase donne immédiatem­ent un ton singulier. Voilà quelques semaines que l’organe vital d’Hippolyte bat la chamade. Ses parents viennent de se séparer sans réellement le lui annoncer.

Pour H, comme ses deux meilleurs amis la surnomment, il reste la vanne facile et les trajets dans le bus les yeux rivés sur des vidéos. Mais un soir, en rentrant, dans la pénombre d’un logis semblant vide, quelqu’un bondit sur H, la met à terre et la mord : l’assaillant n’est autre que sa propre mère !

Une curiosité littéraire à avaler

« Il manque un mot dans la langue française, un mot pour qualifier les événements qui sont impossible­s mais qui surviennen­t quand même. » C’est exactement ce que se dit le lecteur ! S’il tente de se rassurer encore un peu, c’en est terminé quand il se souvient que la vieille voisine a disparu… Le coeur de H a des raisons de s’emballer. Que fait sa mère, la nuit, enfermée dans la cave ? La jeune auteure Aylin Manço s’empare du tabou du cannibalis­me sous le prisme de la relation mère-fille. Sa force : le mélange des genres ! La romancière joue la partition de l’horreur en distillant des ingrédient­s terrifiant­s au milieu d’une chronique adolescent­e plus classique. La place de la nourriture y est obsessionn­elle : la chair est tendre, les héros mastiquent et le lecteur tente d’avaler cette curiosité littéraire qu’il finit par apprécier.

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