FANTASY/ ROMANCE
Gauthier Guillemin nous entraîne plus au coeur de son imaginaire dans cette suite de Rivages, davantage rythmée et moins contemplative, mais toujours portée par un style poétique et enchanteur, qui nous avait tant séduits.
Dans son premier roman, Gauthier Guillemin nous ouvrait les portes du Dômaine. Le Voyageur, un exilé volontaire ayant fui la Cité des hommes et leur civilisation en déliquescence, était alors notre guide. Son exploration des lieux, à la rencontre des peuples mythiques perdus dans une nature inflexible régnant en majesté sur tous les territoires, était une ode à l’émerveillement et à la contemplation, une quête vers un ailleurs rêvé – « entre mythe et réalité, dans une forêt d’arbres et de mots », selon l’auteur, lors d’un entretien en octobre dernier. Pressé par des lecteurs curieux d’en savoir plus sur les Fomoires, les Ondins, le pouvoir du Voyageur capable de se transporter d’arbre en arbre, l’auteur n’a pas attendu très longtemps pour leur offrir une suite. La Fin des étiages nous en apprend ainsi davantage sur les différents peuples réfugiés dans le Dômaine, leur histoire commune et leurs aspirations, leurs rivalités et les légendes qui cimentent leur communauté. Si les Fomoires apparaissaient conquérants et sanguinaires, avec leurs guerriers tatoués et leur mage maléfique, ils semblent avoir compris que combattre les Ondins n’a plus lieu d’être et qu’ils doivent s’unir à eux pour prétendre mener à bien leur quête commune : retrouver les rivages des océans disparus, ceux de leurs terres ancestrales. Leurs ennemis sont désormais les Nardenyllais, qui se présentent comme des maîtres du savoir, vivant non loin de l’embouchure du fleuve les séparant sans doute de la mer mythique dont personne ne sait s’il elle existe vraiment, mais que tous veulent atteindre. Sous couvert d’érudition, ils étendent toujours un peu plus leur emprise, influençant les politiques de leurs voisins. Et, pour faire fonctionner leur machine infernale, un monstre d’acier construit pour fendre la forêt qui les sépare des rivages, ils n’ont pas hésité à réduire en esclavage les esprits de la nature.
Célébration de la nature
Si le premier opus prenait la forme du roman d’apprentissage et du voyage initiatique à travers le regard d’un seul personnage, le second change de ton avec le développement d’intrigues et plus d’actions, dont quelques scènes d’affrontements donnant une tonalité épique, mais n’omettant jamais de faire la part belle au style poétique. Dans La Fin des étiages, comme dans Rivages, chaque chapitre est introduit par une citation d’auteurs, essentiellement des poètes. Ainsi Baudelaire, Mallarmé ou Segalen nous accompagnent-ils dans cette épopée bercée par les mythes et les rêves, portée par la plume éthérée et précise de Gauthier Guillemin. Cette célébration de la nature et de l’imaginaire sur fond de quête des origines est une véritable échappatoire au réel. Une invitation à l’enchantement, qu’il serait bien difficile de ne pas accepter en ces temps délétères…