DÉLICES ZUTIQUES
Dans ce document majeur qu’est l’Album zutique, témoignage de la rencontre de Rimbaud et des poètes les plus radicaux de la bohème artistique du Quartier latin (les « Zutistes » Cros, Cabaner, Richepin, Verlaine, etc.), les saillies gaillardes, anticléricales et autres pastiches politiquement subversifs ne manquent pas. De Rimbaud, on trouve autant de pièces décisives que de traces émouvantes de son séjour parisien mouvementé de l’automne 1871. Verlaine et Rimbaud ont offert son chefd’oeuvre à l’album avec le mythique « sonnet du trou du cul » dont le premier écrivit les quatrains, le second les tercets. Dans les pages qui suivent, un autre collègue devenu célèbre, le bon bourgeois réac François Coppée, se voit conspué par Rimbaud à coups de pastiches hilarants tels qu’État de Siège ou Le Balai (parodie scatologique de la position d’assis de Coppée durant la Commune : « C’est un humble balai de chiendent, trop dur [...] L’usage en est navrant et ne vaut pas qu’on rie »). Mais la pièce maîtresse de Rimbaud demeure Les Remembrances du vieillard idiot, long poème dévoilant sous le pastiche coppéen une dérangeante plongée dans les arcanes de l’enfance du poète. Le plus grand fantôme de Rimbaud, son père, y apparaît dans les brumes d’une trouble confession :
« – Car un père est troublant ! – et les choses conçues !... / Son genou, câlineur parfois ; son pantalon / Dont mon doigt désirait ouvrir la fente,… – Oh ! non ! »