Lu et à prouver
Étant donné que deux lecteurs qui lisent le même livre n’en retiennent jamais la même chose, lequel est le bon lecteur, lequel est le mauvais ? La mauvaise lecture est une question passionnante, abordée par la bande dans divers essais parus ces dernières années. Maxime Decout s’y attarde dans Éloge du mauvais lecteur, « initiation en douceur aux principes de la mauvaise lecture », voire introduction à l’art subtil de mal lire. Si mal lire peut consister à ne prendre nulle distance vis-à-vis d’un texte, ou à raconter n’importe quoi sur lui, cela peut consister aussi à s’accorder une liberté contrôlée, en lisant dans le désordre, ou distraitement, et à accéder ainsi à des aspects cachés du texte.
Il y va donc des mauvaises lectures comme des lectures : il y a les bonnes et les mauvaises. L’auteur explore les figures de la mauvaise lecture du xviiie siècle à nos jours, en prenant à témoin divers écrivains classiques (Borges, Nabokov, James) ou contemporains (Éric Chevillard, Pierre Senges, Tanguy Viel). Suggestif et stimulant, ce bref essai déculpabilise le lecteur, invité à n’avoir plus peur de ses sentiments et à se lancer, tête haute, dans « une pratique clairvoyante, allègre et créatrice de la mauvaise lecture ».