UN EFFROYABLE CONSTAT
En 2017, 158 000 Américains ont succombé à ce que nous appelons une mort de désespoir : suicide, overdose, maladie alcoolique du foie et cirrhose. C’est comme si trois Boeing 737 s’étaient écrasés chaque jour, sans un seul survivant. […] Les trois types de morts de désespoir impliquent une action de la part de celui qui meurt : c’est surtout évident pour le suicide, lorsque l’on “se donne la mort”, mais c’est tout aussi vrai lorsque l’on consomme trop de drogue ou d’alcool pendant trop longtemps. Il y a plus d’un siècle, Émile Durkheim affirmait que pour comprendre le suicide […], il faut regarder la société plus que l’individu, et surtout les troubles et la faillite d’une société qui ne peut plus offrir à ses membres un environnement où mener une vie riche de sens. Durkheim pensait que les gens plus instruits étaient plus susceptibles de se tuer. Pourtant, dans l’actuelle épidémie américaine, et comme pour la souffrance et la maladie, la hausse des suicides s’est avant tout produite parmi les moins instruits, fait peut-être unique dans l’Histoire. Paradoxalement, cela ne contredit pas Durkheim, car c’est le monde des Blancs non instruits qui est aujourd’hui dans la tourmente. […]
Les bouleversements économiques et sociaux qui se sont abattus sur leur vie poussent un nombre croissant d’entre eux à se donner la mort. […] En 2017, 47 000 Américains sont morts par suicide. […] La maladie alcoolique du foie et la cirrhose [en] ont tué 41 000. […] [Et la même année,] il y a eu aux États-Unis 70 237 “morts accidentelles” par overdose. »