Des goûts et des couleurs
La plateforme de vidéo à la demande de Carlotta films brasse large, entre cinéma pointu et gore sanglant…
VOD.
Les salles de cinéma devraient rouvrir avant l’été. Bonne nouvelle et doigts croisés. En attendant, c’est à la maison que ça se passe, sur un écran de télé, grâce aux nombreuses plateformes de vidéo à la demande (VàD). Parmi toutes ces offres, celle de Carlotta Films se distingue par un éclectisme bienvenu, en forme de grand écart, qui propose à la fois de la série B policière des années 1980 (Blue Jean Cop), de l’horreur sanglante
(Maniac Cop), du japonais raffiné (les films de Yasujiro Ozu) et du classique
(Mr Arkadin d’Orson Welles). Ils ne sont pas si nombreux à brasser si large et à s’attacher à un cinéma d’auteur goulu qui met en avant, par exemple, Frankenhooker de Frank Henenlotter – les amateurs de tondeuse à gazon comprendront…
Les lecteurs cinéphiles trouveront également leur bonheur entre classiques et raretés. Au rayon classique : Le Festin de Babette, d’après Karen Blixen, Sa Majesté des mouches, d’après William Golding, ou La Ronde, merveille absolue de Max Ophüls adaptée d’Arthur Schnitzler. Côté rareté, on ne saurait que trop recommander Le Malin de John Huston d’après Flannery O’Connor et La Condition humaine adapté de Junpei Gomikawa ; le film dure plus de neuf heures, de quoi patienter jusqu’à la réouverture des salles…
Polémique récurrente : pourquoi retrouve-t-on si peu de longs-métrages réalisés par des femmes sélectionnés dans les grands festivals ? S’il y a une réponse strictement arithmétique (même si les choses ont évolué, il y a aujourd’hui encore davantage de metteurs en scène masculins que féminins), il convient de réfléchir en amont sur les causes, pour mieux avancer. Voilà pourquoi le livre de Véronique Le Bris tombe à point, afin de nous rappeler le travail de nombre de grandes cinéastes, à travers (généralement) un film symbole présenté de manière pédagogique. S’il y a des noms évidents (Alice Guy, Chantal Akerman, Jane Campion, Sofia Coppola…), 100 grands films de réalisatrices nous permet aussi de redécouvrir des créatrices méconnues, du monde entier. Seul regret : l’absence de quelques noms, certes expliquée par des raisons d’accessibilité (au-delà du scandale, difficile d’oublier Leni Riefenstahl).
Excédé par l’angélisme de son fils, Dieu demande à Sunstar, le super-héros le plus puissant de la Terre, d’accueillir Jésus comme colocataire afin de lui apprendre à utiliser ses pouvoirs de manière plus spectaculaire. C’est le début d’une cohabitation mouvementée qui voit la candeur du premier se heurter constamment à la maladresse du second, illustrant parfaitement l’adage selon lequel l’enfer est pavé de bonnes intentions
Outre son improbable pitch, Le Retour du Messie. Verset 1 interpelle surtout par la polémique qu’il a suscitée. Effrayés par son caractère potentiellement blasphématoire, des groupuscules religieux américains ont fait pression auprès de l’éditeur DC Comics pour qu’il ne publie pas la série. Repêché par l’éditeur indépendant AHOY
Comics en 2019, Le Retour du Messie arrive enfin dans nos contrées grâce à Delcourt. Le résultat se révèle-t-il à la hauteur de sa sulfureuse réputation ? Oui et non.
Entre un Jésus candide faisant le désespoir d’un Dieu bougon, un ersatz de Superman aussi impulsif que maladroit et une vision très capitalistique du paradis, le créateur Mark Russell n’y va pas avec le dos de la cuillère et déconstruit, avec malice, certains des mythes les plus prégnants de notre société occidentale. Mais aussi iconoclaste qu’il soit, Le Retour du Messie reste une oeuvre profondément habitée par son sujet, Mark Russell délivrant son insistant message sur les bienfaits de l’altruisme avec la finesse d’un prédicateur new age ! Le résultat se révèle extrêmement réjouissant par son côté décomplexé et son humour mordant Romains Non ! À l’époque, distribuaient les faisant peu de prisonniers les crucifixions comme ! À la fin de ce des petits pains ! premier tome, l’auteur écrit en note : « On 001_083SECONDCOMING01_ok.indd 30 11/02/2021 11:56 blasphème non pas pour rabaisser la foi de millions de personnes, mais pour apporter au monde quelque chose de neuf. » Amen !
Le 15 mars dernier, Patrick Fevret lançait en grande pompe une plateforme novatrice et prometteuse. Alors que la situation sanitaire a grandement chahuté le secteur, GoodBook propose de fédérer numériquement tous les acteurs du livre avec une idée en tête, agréger et centraliser toutes les informations liées à la filière.
Auteurs, lecteurs, blogueurs, éditeurs, libraires, institutions, tous sont invités à constituer une base de données littéraire de référence en France. Sur le site, accessible gratuitement, trois onglets s’offrent ainsi aux visiteurs. Une rubrique « En librairie » sur laquelle un tour d’horizon complet des parutions est mis à notre disposition, avec une curation très détaillée allant des éditeurs les plus connus jusqu’à certains éditeurs spécialisés. Une page « Événements » recensant les prochaines rencontres virtuelles, les prix littéraires et autres initiatives liées au livre, et qui s’ouvrira bien sûr aux salons traditionnels et aux manifestations à travers la France. Et, enfin, une page « Contenus » où sont référencés tous les articles, posts, émissions télé et radios ou encore podcasts traitant des différentes parutions de l’actualité littéraire.
À terme, l’objectif est clair : un visiteur fan de Delphine de Vigan, par exemple, pourra taper son nom et avoir accès à toutes ses parutions, aux éventuels événements autour de son livre et à une imposante revue de presse. Une mine d’informations pour les lecteurs, mais aussi un outil précieux pour les éditeurs ou les libraires qui voudraient intensifier leurs liens avec les maisons d’édition. Une belle démonstration prouvant que le numérique peut se mettre au service des acteurs traditionnels du livre. Longue vie à GoodBook !