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« Faire des BD pour des gens qui n’en lisent pas »

Depuis maintenant six ans, Riad Sattouf raconte à sa manière le quotidien, bien réel, d’une fille sans histoire, désormais adolescent­e, prénommée Esther. Entretien à l’occasion de la parution du sixième tome de ces Cahiers d’Esther à succès.

- Propos recueillis par Rabih Hawa et Baptiste Liger

L’héroïne des Cahiers d’Esther a, dans ce volume, 15 ans. S’agit-il du plus bel âge de la vie ?

Riad Sattouf. La jeunesse passe en un éclair, alors difficile de dire s’il y a un âge plus beau qu’un autre ! 15 ans, c’est l’âge des promesses mais aussi des angoisses, des doutes, de la rencontre avec celle ou celui que l’on sera à l’âge adulte… Avoir 45 ans dans un corps de 15 ans serait sans doute le plus bel âge mais c’est impossible…

A-t-il été difficile pour vous de devenir symbolique­ment, à travers la vie réelle de ton modèle, une fille ?

R.S. Je dessine Les Cahiers d’Esther d’après les histoires d’une vraie jeune fille, depuis ses 9 ans. Le projet est de la suivre jusqu’à ses 18 ans, âge où elle sera responsabl­e pénalement de ses paroles ! C’est avant tout une curiosité personnell­e : je veux garder le contact avec la jeunesse, au travers d’un cas particulie­r ! La grande difficulté de ce projet est peut-être de la dissimuler, de changer les histoires et l’identité des personnes pour qu’on ne puisse pas découvrir la vraie Esther.

Esther est-elle, à vos yeux, une adolescent­e comme les autres ? Ou plutôt « différente » ?

R.S. Ce qui m’a intéressé avec elle, c’est qu’il s’agit paradoxale­ment d’une jeune fille « sans histoires » – famille équilibrée, bonne élève, plutôt populaire à l’école. De celles à qui l’on ne s’intéresse pas forcément. Ainsi, j’ai souhaité montrer une époque, à travers le point de vue d’une jeunesse particuliè­re.

Le public d’Esther est-il très différent de celui-ci de L’Arabe du futur ? Ou y a-t-il, disons, un « tronc commun » ?

R.S. Faire des bandes dessinées pour les gens qui n’en lisent pas, c’est mon grand but ! Des familles, des mamies, des papis, des enfants, des gens de toutes classes sociales… C’est cela qui compte. Au bout de vingt ans, je connais très bien mes lectrices et mes lecteurs : ils sont avant tout passionnés par les livres. Sur mon compte Instagram, je reçois à longueur de journée des photos envoyées par des parents montrant leurs enfants en train de lire mes albums. Ils sont enchantés et ravis qu’ils lisent, tout simplement. Rien ne me rend plus heureux !

LES CAHIERS D’ESTHER (T.6). HISTOIRES DE MES 15 ANS RIAD SATTOUF 56 P., ALLARY, 16,90 €

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