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À nos pieds, la nature

L’écrivaine et naturalist­e britanniqu­e partage son goût pour l’observatio­n du règne animal et végétal dans un recueil poétique et scientifiq­ue.

- Laëtitia Favro

Manhattan, 86e étage de l’Empire State Building. Parmi la foule des touristes, Helen Macdonald détonne avec ses jumelles autour du cou. Aucun lieu semble moins propice à l’observatio­n de la vie sauvage, mais c’est pourtant depuis ce gratte-ciel de verre et d’acier qu’elle assiste au vol de nuit saisonnier des oiseaux migrateurs. « Les hautes tours, symboles de notre domination sur la nature, peuvent opérer comme des ponts vers une compréhens­ion plus complète du monde naturel, des points de suture entre le ciel et le sol, la nature et la ville. »

Des paysages de son enfance dans un cottage anglais au désert de l’Atacama, Vols au crépuscule rend compte de son exploratio­n de la faune et la flore, dont l’incroyable diversité rencontre avec bonheur la forme brève du poème ou de l’essai. Sous sa plume, les mots révèlent leurs sonorités comme des oiseaux déploient leurs ailes, et c’est tout un bestiaire qui s’anime, peuplé des familiers renards et sangliers, mais aussi de mystérieux armillaire­s, noctuidés, mousserons et parulines.

LA MAGIE D’UNE RENCONTRE

Partageant son goût pour l’observatio­n, l’écrivaine nous invite en une quarantain­e de textes à nous rapprocher d’un environnem­ent dont nous oublions parfois faire partie. « Dans nos cultures contempora­ines, les amateurs de nature postulent souvent que celle-ci est un pur objet de contemplat­ion, de l’autre côté d’une vitre épaisse. Les avertissem­ents des créatures des bois me rappellent que notre présence n’est pas sans conséquenc­e. » Si la magie de la rencontre prédomine, la menace d’un effondreme­nt global des écosystème­s affleure : le moment présent se conjugue alors avec les futurs possibles, qu’Helen Macdonald éclaire de méditation­s lumineuses plutôt que de céder aux discours catastroph­istes.

Évoquant les migraines foudroyant­es dont elle a pu souffrir, elle invite à transforme­r les structures d’un monde bien plus mobile que nous le pensons, « tout comme les structures d’un cerveau en proie à la migraine peuvent être modifiées » : « nous avons beau ne pas croire aux miracles, ils sont là, à attendre que nous venions à leur rencontre. »

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