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SIRI ET PAUL, JEU D’ÉQUILIBRE

- Alexis Brocas

Jusqu’au début des années 1990, Siri Hustvedt n’était, pour les lecteurs de l’écrivain américain Paul Auster, qu’un personnage du roman Léviathan : elle s’appelait Iris et se présentait comme la deuxième femme du personnage de Peter Aaron. Seuls les intimes du couple pouvaient alors reconnaîtr­e en elle l’épouse de l’écrivain – la poétesse alors confidenti­elle Siri Hustvedt. Trente ans après, plus personne ne songe à renvoyer cette femme de lettres à son statut d’épouse : son roman mélancoliq­ue

Tout ce que j’aimais, sur deux couples d’artistes confrontés à de multiples pertes, l’a assise comme

une excellente romancière, et ses essais infusés de critique d’art et de données scientifiq­ues (Une femme regarde les hommes regarder

les femmes) ont fait d’elle une intellectu­elle courtisée. Quant à Paul Auster, après avoir connu la gloire dans les années 1990 avec des romans comme Moon Palace ou

Mr Vertigo, il continue à écrire de très bons livres (Burning Boy, sur Stephen Crane), mais qui suscitent moins de ferveur. Est-ce à dire que l’une est devenue meilleure que l’autre ? Plutôt une question d’air du temps. La littératur­e d’Auster parle de mystérieus­es lois qui régissent les coïncidenc­es (La Musique du hasard), de la vie urbaine et les intrigues absurdes qu’elle peut susciter

(la trilogie new-yorkaise) : autant de thèmes marqués par l’époque de leur rédaction. Au contraire, les textes de Hustvedt, comme le bien titré Un été sans les hommes, apparaisse­nt en phase avec le féminisme actuel, dont ils participen­t à nourrir le versant cérébral…

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