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Cuba, pour vivre et pour écrire

Une somme d’essais, particuliè­rement instructif­s sur les méandres de la création, signés du grand auteur cubain Leonardo Padura.

- Simon Bentolila

J «e voudrais être Paul Auster. » Sous la plume de l’emblématiq­ue écrivain cubain, ce mot d’humour, d’apparence anodine, dessine la frontière symbolique qui distingue la vie littéraire cubaine des autres. En interview, quand l’écrivain américain répond à de plaisantes questions sur la littératur­e, son homologue caribéen doit systématiq­uement donner son point de vue sur l’avenir de son pays. En effet, tous les textes réunis dans ce recueil d’essais sur l’écriture tournent autour de cette « divine trinité » qui conditionn­e la vie et l’oeuvre de Leonardo Padura : être un écrivain cubain, qui vit et écrit à Cuba. Ce que le poète Virgilio Piñera appelle « la maudite circonstan­ce de l’eau de toutes parts » en est la matérialis­ation. De part et d’autre du Malecón, serpent de pierre délimitant la frontière cubaine, il y a la « sensation d’enfermemen­t » et, de l’autre côté du mur, « le fléau de la nostalgie » des exilés.

Penchons-nous sur ce que ces textes ont d’universel et d’éclairant dans l’apprentiss­age de l’écriture. Dans quel but écrit-on ? L’auteur élude cette question par la descriptio­n du cheminemen­t de son processus créatif, dans l’écriture de quelques-uns de ses romans. En créant son personnage Mario Conde, policier très littéraire et même anti-policier, l’auteur fait céder « les verrous de la création littéraire ». Au-delà de la simple création d’une énigme, voici ce qui définit le polar : créer des personnage­s dotés « d’une épaisseur qui en fassent les référents de réalités sociales et historique­s », auxquels le lecteur s’identifie. Quant aux coulisses de l’écriture de L’homme qui aimait les chiens, elles sont un véritable traité de méthodolog­ie de la documentat­ion. Enfin, l’essai le plus passionnan­t est sûrement celui intitulé « La raison d’être du roman », ou comment décrire les comporteme­nts de la condition humaine.

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 ?? ?? L’EAU DE TOUTES PARTS. VIVRE ET ÉCRIRE À CUBA (AGUA POR TODAS PARTES) LEONARDO PADURA
TRADUIT DE L’ESPAGNOL (CUBA) PAR ELENA ZAYAS 400 P., MÉTAILIÉ, 24 €
L’EAU DE TOUTES PARTS. VIVRE ET ÉCRIRE À CUBA (AGUA POR TODAS PARTES) LEONARDO PADURA TRADUIT DE L’ESPAGNOL (CUBA) PAR ELENA ZAYAS 400 P., MÉTAILIÉ, 24 €

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