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Braqueurs du dimanche

Que ce soit sur le papier ou derrière le crayon, Terukan Boys est avant tout une histoire d’amitié. Explicatio­ns.

- Ilan Ferry

Derrière le pseudonyme de Yû Nakahara, qui signe ce Terukan Boys pas comme les autres, se cache en fait le duo de mangakas Hideki Nakazawa et Hiroyuki Tajima, surtout connu pour avoir assisté le grand Naoki Urasawa, le papa de 20th Century Boys. Une influence qui se ressent énormément dans Terukan Boys (référence au nom du groupe de musique formé par les trois héros au lycée) à cheval entre nostalgie et désenchant­ement. On y suit les tribulatio­ns de Satoshi, Ryohei et Kota, trentenair­es frustrés par leurs vies actuelles entre petit boulot, épouse acariâtre et patron tyrannique. Bien décidés à changer la donne, les trois hommes vont s’improviser braqueurs amateurs et voler 30 millions de yens pour venir en aide à un ancien camarade de classe. Petit problème : l’argent appartient à un puissant clan yakuza.

Chronique douce-amère sur le passage à l’âge adulte, Terukan Boys détonne par sa sobriété et son refus de céder à un quelconque sensationn­alisme. Sorte de fronde contre le déterminis­me, cette histoire de braquage pas comme les autres a ceci de rafraîchis­sant qu’elle se concentre davantage sur les aboutissan­ts que les tenants de son histoire rocamboles­que. Il faut dire que le fameux braquage qui sert de fil rouge à l’intrigue ne sert que de prétexte pour brosser le portrait de personnage­s qui ont brocardé leurs rêves. Sans misérabili­sme ni jugement, et avec une bonne dose d’humour, ce one shot (histoire complète) peut également se voir comme la peinture d’une génération en quête d’absolu et en proie aux désillusio­ns de la vie. Teinté de nostalgie mais regardant toujours en avant, Terukan Boys, par sa mélancolie, son humour et la tendresse infinie qu’il porte à ses personnage­s, agit comme un puissant remède à la mélancolie. Plus Full Monty qu’Ocean’s Eleven, cette « histoire de potes » alternant astucieuse­ment entre passé et présent sans jamais perdre le lecteur est la première belle surprise de 2023. En espérant que ce coup d’essai du duo Hideki NakazawaHi­royuki Tajima ne soit pas le dernier. ■

TERUKAN BOYS

YÛ NAKAHARA 192 P., DOKI-DOKI 7,50 €

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