La mère en scène
Elle est en ce moment la figure centrale de deux spectacles parmi les plus émouvants donnés à Paris en ce début d’année.
Adaptation ingénieuse par le metteur en scène Xavier Lemaire du roman Les dix enfants que Madame Ming n’a jamais eus d’Éric-Emmanuel Schmitt, Madame Ming, au théâtre Rive-Gauche, dresse le portrait d’une Chinoise, dame-pipi dans un grand hôtel de Shanghai, qui évoque, au fil de ses rencontres avec un homme d’affaires français, ses relations avec ses dix enfants. Dix ? Dans le pays de l’enfant unique ? Madame Ming est-elle vraiment cette mère si aimante et si héroïque qu’elle prétend être ou s’est-elle créé un destin imaginaire ? Quoi qu’il en soit, elle raconte avec une poésie folle, une émotion contagieuse et un humour mélancolique ce que peut être la mère d’une famille si nombreuse, en entrecoupant son récit de maximes philosophiques et d’évocations sur des événements majeurs de l’histoire de la Chine. C’est la très fine Isabelle Andréani qui est Madame Ming. Face à un Benjamin Egner impeccable (l’homme d’affaires), elle est soutenue dans son jeu par des marionnettes, avatars de ses enfants, et aussi par les magiques solos du violoncelle d’Elsa Moatti. Au Studio Hébertot, Votre Maman, de Jean-Claude Grumberg, balance les spectateurs entre rires et larmes, avec l’humour désespéré qu’on lui connaît. Proche de l’univers de Beckett, sa pièce met en scène une mère à la mémoire défaillante, qui enchaîne les frasques dans l’Ehpad où l’a mise son fils, qu’elle ne reconnaît pas. Dans le rôle de cette maman juive dont on comprend qu’elle a connu la Shoah, Colette Louvois est prodigieuse. Ses partenaires, Marc F. Duret (le fils) et Jean-Paul Comart (Le directeur de l’Ehpad) sont hilarants. ■