Top cheffes
Au moment où sort en salles le long-métrage Tàr, revenons sur les parcours, retracés dans des livres de référence, de trois femmes ayant dirigé de grands orchestres.
C’est l’un des événements cinématographiques du premier trimestre 2023 : la sortie du formidable long-métrage de Todd Field, Tàr (en salles le 25 janvier), qui a valu un prix d’interprétation à la Mostra de Venise à Cate Blanchett, géniale en cheffe d’orchestre fictive. Mais cela ne doit pas nous faire oublier la réalité, qui se raconte dans les ouvrages de trois femmes directrices d’orchestres parus ces dernières années.
En 1995, elle était la première femme à diriger l’Orchestre de la Scala de Milan. Claire Gibault a ouvert la voie dans « l’un des domaines les plus masculins qui soient », et a raconté ce métier d’engagement total au fil d’une biographie sobre et débordante d’humanité. La vie solitaire du chef se révèle, dans La Musique à mains nues (L’Iconoclaste, 2010), qui n’épargne pas son objet : un environnement dur et hermétique aux femmes jusque très récemment.
À 44 ans, Zahia Ziouani porte avec panache une vocation chevillée au corps. Fille d’immigrés algériens, elle dévoile son parcours dans un récit sans détour, La chef d’orchestre (Anne Carrière, 2010). On la suit, étudiante formée auprès de Sergiu Celibidache, puis jeune femme ambitieuse à la tête de son ensemble Divertimento. On découvre également l’artiste de coeur dans les banlieues qu’elle n’a pas quittées – un écho hexagonal au projet vénézuélien El Sistema de Gustavo Dudamel.
Par le hasard d’une rencontre, Debora Waldman découvre en 2014 la symphonie d’une compositrice inconnue, Charlotte Sohy. La cheffe israélo-brésilienne crée alors cinq ans plus tard la Symphonie « Grande Guerre » à Besançon. Associée à Pauline Sommelet, elle retrace dans La Symphonie oubliée (Robert Laffont, 2021), son itinéraire croisé avec celui d’une autre pionnière. L’aînée, élève de Vierne et d’Indy, a dû placer son art entre les parenthèses de la vie d’épouse et de la maternité. La cadette devenait en 2020 la première femme à la tête d’une formation nationale à Avignon.