« Nous donnons une nouvelle vie à des ouvrages qui ne sont plus édités en métropole »
Passionné de littérature et de voitures (si, si, c’est compatible!), Florent Charbonnier orchestre depuis quinze ans un dialogue nécessaire entre les littératures d’outre-mer et les pays francophones du monde entier. Depuis Marie-Galante, le fondateur de Caraïbéditions a répondu à nos questions.
Quel désir fut à l’origine de la création de Caraïbéditions ?
Florent Charbonnier. Dès la naissance de notre maison d’édition en 2007, nous avons souhaité publier des ouvrages ayant un lien avec les Antilles, la Guyane et les îles de l’océan Indien, que ce soit avec les auteurs – originaires ou vivant dans ces territoires d’outre-mer –, avec les thématiques et les histoires qui se déroulent dans ces régions, ou avec les langues créoles ou vernaculaires de chacun de ces territoires.
Comment vous positionnez-vous aujourd’hui en France, métropolitaine et d’outre-mer, et dans les territoires francophones ?
F.C. Nous sommes évidemment très présents dans les librairies des territoires d’outre-mer et dans les librairies afrocaribéennes de l’Hexagone, mais nous sommes également distribués dans les autres librairies françaises ainsi que dans celles des pays francophones européens et africains.
L’un de vos axes forts est la réédition de chefs-d’oeuvre oubliés des outre-mer. Comment expliquer cet oubli ? Et pourquoi y a-t-il urgence à le réparer ?
F.C. Si notre maison d’édition publie des inédits de grands auteurs des outre-mer déjà connus et reconnus dans les mondes francophones, notre volonté est également de ressortir en librairies leurs anciens ouvrages ainsi que ceux d’auteurs décédés, que les grandes maisons d’édition germanopratines ont cessé de publier, souvent pour des raisons financières. Ces livres sont republiés au sein de notre collection « Îles en poche », devenue la référence poche des grands auteurs des outre-mer.
Elle accueille des écrivains aussi célèbres que Roland Brival, Raphaël Confiant, Ananda Devi, Gisèle Pineau, Ernest Pépin ou Jean-François Samlong pour ne citer qu’eux. Nous donnons une nouvelle vie à tous ces ouvrages, qui, pour certains, avaient d’ailleurs connu un joli succès au moment de leur sortie il y a plusieurs années, voire plusieurs dizaines d’années. C’est le cas par exemple de L’Aimé de l’écrivain réunionnais Axel Gauvin. Finaliste du Goncourt en 1990, il n’était plus disponible depuis plus de vingt ans.
Romans, jeunesse, théâtre, essai,votre catalogue est très fourni et aucun genre littéraire ne vous échappe. Qu’est-ce qui guide vos choix en littérature contemporaine ?
F.C. Nous avons toujours été guidés par la volonté de toucher le plus grand nombre au plus petit prix et, selon les ouvrages, dès le collège; d’où, au côté de notre collection roman-poche, une collection théâtre-poche nommée « Didascal’îles » et une collection importante de romans jeunesse dont les ouvrages sont étudiés dans les collèges et les lycées. En ce qui concerne les essais, nous publions aussi bien des livres de primo-auteurs, souvent universitaires ou journalistes, que des écrivains confirmés tels que Raphaël Confiant ou Simone Schwarz-Bart. Nous sommes parfois guidés par le désir de proposer des ouvrages inspirés de ceux qui ont fait leur preuve dans l’Hexagone et que nous « antillanisons », comme l’essai à succès Psychologie des sociétés créoles d’Errol Nuissier. Ce premier ouvrage de psychologie de la Caraïbe aborde les thématiques sociétales antillaises à travers le prisme de la psychologie.
Vous publiez aussi des livres en langues créoles. Quel est l’enjeu pour vous ?
F.C. Caraïbéditions publie en effet des ouvrages mondialement connus en créole des Antilles-Guyane et/ou de La Réunion tels que L’Étranger de Camus, Guerre de Céline, La Tragédie du roi Christophe de Césaire, Le Petit Prince de Saint-Exupéry ou Le Petit Nicolas de Sempé et Goscinny. En mars 2023, nous publierons Plas-la, la traduction en créole de La Place d’Annie Ernaux par Hector Poullet. ■