ÉDITO DE BAPTISTE LIGER
On peut symboliser la société d’une époque à travers les mots qu’elle met le plus en avant. Ainsi, le terme « résilience » revient volontiers, depuis plusieurs années, dans notre quotidien. Révélateur d’un monde qui souffre, subit, mais ne rompt pas et cherche une nouvelle voie. Preuve de la puissance des livres, l’influence des essais de Boris Cyrulnik, spécialiste du concept, n’y est pas pour rien dans l’essor de cette notion. Pour autant, peut-on parler de littérature de résilience? Si oui, sur quels ressorts ces romans, récits ou guides reposent-ils? Sont-ils si différents des ouvrages qui « font du bien » ou des volumes de développement personnel? Voici quelques éléments du dossier que Lire Magazine littéraire consacre ce mois-ci à ce sujet – n’omettant pas cet élément essentiel: tout ouvrage, au-delà de la volonté de son auteur ou de la subjectivité de son lecteur, peut être, de près ou de (très) loin, une affaire de résilience… Certaines parutions très attendues de cette rentrée d’hiver pourraient ainsi facilement se classer dans cette case – celles, par exemple, d’Adèle Van Reeth, Justine Augier, Patrick Autréaux ou Maud Ankaoua. Mais d’autres ouvrages méritent assurément le détour en ce début 2023, parmi lesquels Le Silence et la Colère de Pierre Lemaitre (suite du
Grand Monde), le dernier « Malaussène » de Daniel Pennac, les nouvelles horrifiques de Mariana Enriquez, l’essai Pourquoi la guerre? de Frédéric Gros ou le formidable roman graphique Journal d’une invasion d’Igort sur le conflit ukrainien. À vous de découvrir tous ces conseils dans cette édition. En ayant une pensée pour Russell Banks, dont nous venons d’apprendre la disparition. Et qui avait trouvé dans L’Ange sur le toit une belle définition du travail des écrivains: « Nous échangeons des histoires en priant que cet ange sur le toit les transforme au cours de la narration, qu’elles deviennent crédibles et parlent de nous tous, qui que nous soyons les uns pour les autres. » ■