écrivains Les sur la route
Qu’ils voyagent en voiture, comme Annemarie Schwarzenbach et Jack Kerouac, ou qu’ils se fient à leurs mollets, comme Nietzsche ou Robert Walser, les écrivains et philosophes ont toujours perçu la route comme une précieuse alliée. Non seulement parce qu’elle les mène vers des découvertes qui, souvent, nourriront leur pensée ou leur inspiration, mais aussi parce que le simple fait de se déplacer entraîne un changement d’état d’esprit qui permet de reconsidérer son écriture à distance, comme s’il fallait s’éloigner de sa montagne de papier pour embrasser son contenu d’un seul regard, ou selon des perspectives nouvelles. Notre célèbre collaborateur Éric-Emmanuel Schmitt connaît bien le sujet : pour lui « pas un problème d’écriture qui ne peut être réglé par une bonne marche ». Il n’est pas le seul à partager cette idée. C’est lors d’une promenade que Rousseau a reçu le choc qui changerait sa vie et son écriture. Et c’est au fil de ses dérives urbaines que Walter Benjamin a exploré sa liberté en acte. Dès lors, pourquoi ne pas faire de la route, de la promenade, le sujet même de son écriture ? Beaucoup s’y s’ont employés, plusieurs s’en sont fait une spécialité. Hier Baudelaire sillonnant Paris ou Debord théorisant ses errances
« psychogéographiques » ; aujourd’hui Sylvain Tesson, Jean Rolin ou Maryline Desbiolles. La route n’a pas d’âge... Elle a, en revanche, ses rayonnages en librairies, preuve que nos désirs d’ailleurs ont été bien identifiés par l’édition – qui produit des livres destinés à la fois aux aspirants voyageurs et aux lecteurs qui préfèrent se déplacer par la pensée. Ces sédentaires savent bien que tout texte est en lui-même voyage en psyché étrangère. Et quand il conte les pérégrinations du propriétaire de ladite psyché sur des terres inconnues, le dépaysement compte double !
■