LES ROUTES DE LA BANQUISE
Hubert Prolongeau, collaborateur de notre magazine, est allé au Groenland à la rencontre d’un aventurier hors du commun et en a tiré un récit à la fois euphorisant et glaçant.
Le Dernier chasseur est français et s’appelle Julien Caquineau. Au Groenland, il est devenu, non sans mal, un conducteur de traîneau respecté, capable de repérer les phoques là où le béotien ne voit que du blanc, de sortir son matériel des trous d’eau et de se faire obéir de ses chiens (qui, là-bas, ne sont pas des huskys). Ses routes sont celles qui apparaissent derrière lui, sous ses patins, ou sous ceux de ses confrères. Mais les forfanteries des conquérants autoproclamés de l’impossible lui sont étrangères. Notre collaborateur Hubert Prolongeau a rencontré cet homme de 46 ans, admirateur de Paul-Émile Victor, en marge d’un voyage de presse, et a passé plusieurs séjours à ses côtés. Le livre qu’il en a tiré s’avale d’une traite, comme un alcool glacé, qui laisse à la fois euphorique et sonné. Euphorique, car il nous prouve que oui, se réinventer une existence est possible, comme l’atteste le chemin de Julien – passé par le sport extrême, puis par des conduites extrêmes. Sonné car le Groenland de Julien n’est pas exactement le paradis blanc de Michel Berger. Plutôt un magnifique enfer semé de pièges mortels – les mésaventures qu’y a connues notre chasseur sont à se glacer les sangs. Ce n’est pas non plus un lieu intouché par la modernité : tous les villages, aussi isolés soient-ils, sont connectés à Internet, les motoneiges tendent à remplacer les traîneaux, et le réchauffement climatique affecte les rennes, les ours et ceux qui les chassent… Il n’empêche : la vie de Julien a des airs d’aventure recommencée à chaque saison. ■