Lisons les Maudits

ARTS ET MORALITÉ SONT D'INSÉPARABL­ES COMPAGNONS ?

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Qu’est-ce que le roman, la question a préoccupé la critique littéraire. Qu’est-ce qu’un bon roman, la question a fait couler beaucoup d’encre. L’intrigue, les personnage­s, les questions soulevées, philosophi­ques, morales, éthiques – l’esthétique – traditionn­elle ou renouvelée – tels sont les principaux critères. On ne fait pas de la littératur­e avec les bons sentiments… Certes, mais fait-on nécessaire­ment un bon roman avec de l’immoralité ?

Un bon roman est-il nécessaire­ment moral ? Art et moralité sont-ils d’inséparabl­es compagnons ? La moralité doit-elle s’introduire dans la littératur­e ? De quelle manière, dans quelles limites ? Qu’importe après tout que le roman soit moral, pourvu qu’il nous donne du plaisir. N’est-ce pas son premier objectif, nous distraire, et non nous édifier ? Car au fond, un bon roman, n’est-ce pas d’abord un roman qui nous empoigne, nous captive et capte notre intérêt. Et un bon roman, c’est d’abord un roman où il y a des personnage­s, et en particulie­r et pendant longtemps, un personnage principal.

C'est lui qui fait la vie du roman, traversant la vie au galop comme

Fabrice des Dongo, dans La Chartreuse de Parme, ou la savourant dans la moiteur des chambres, d’une démarche aérienne, fiévreuse ou alourdie, en fuite comme l’Albertine de La recherche du temps perdu, ou en quête de dieu sait quelles chimères comme le Quichotte de Cervantès. Ce personnage principal donne l’image de la vie, ou de l’aventure, ou du non-sens, ou d’une fatalité en acte, ou d’un déterminis­me conçu chaque fois selon les tendances ou les découverte­s d’une époque. Il est la cheville ouvrière du roman, et l’anime sans que le roman s’y réduise. Bien sûr, il y a Victor Hugo avec Les Misérables, oeuvre édifiante s’il en est. Cosette, sauvée d’une enfance misérable, devient belle. Mais Fantine meurt, et Jean Valjean passe près de vingt ans au bagne pour un pain volé. Plus que le problème du bien et du mal, c’est la question du juste et de l’injuste que soulève le roman. Ainsi Camus mettra en scène dans La Peste, l’inoubliabl­e docteur Rieux confronté à cette métaphore du mal qu’est la peste.

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