“SA DIGNITÉ, SA VAILLANCE, SON INTRÉPIDITÉ M’OBSÈDENT”
Simone Veil, la dignité de cette femme, sa vaillance, son intrépidité m’obsèdent. Son retour, longtemps après, dans le camp d’Auschwitz sous la neige : elle fit alors preuve d’un courage que je n’aurais jamais eu. Je me souviens, comme si c’était hier, du coup de téléphone que m’a passé Gisèle Halimi pour que je signe dans « le Nouvel Obs », en avril 1971, le « Manifeste des 343 » pour la dépénalisation de l’IVG qui allait donner naissance à la loi Veil. Elle m’avait bien avertie que, toutes, on risquait une peine d’emprisonnement. J’ai dit oui, je signe, sans hésiter. Je me souviens aussi que, après la publication du « Manifeste », Simone Signoret m’avait appelée en m’engueulant : « Je n’étais pas au courant. Mais pourquoi tu ne m’as pas téléphoné, j’aurais signé des deux mains ! »
Bien des décennies après, c’était au début des années 2000, Ivan Levaï, qui dirigeait la Chaîne parlementaire, m’a demandé de lire, à la télévision, le texte magnifique prononcé par Simone Veil à la Chambre des Députés, dans lequel elle dit notamment : « Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme – je m’excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d’hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de coeur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame… » Eh bien, je peux vous avouer que, de toute ma vie de comédienne, je n’ai jamais éprouvé une émotion aussi forte, aussi intense. A la fin de ma lecture, j’étais en larmes. Non seulement parce que son discours est bouleversant, mais aussi parce que je pensais à la manière dont elle n’avait pas tremblé devant les insultes et les menaces, cachant son visage lorsque les attaques étaient trop rudes. Et puis, ce discours de Simone Veil, en 1974, est toujours d’actualité lorsqu’on voit, aujourd’hui, tous les pays où l’avortement est puni et la contraception interdite.