Madame Figaro

Claire Devé-Rakoff, la créativité à fleur de peau.

Pour sa première collection de HAUTE JOAILLERIE chez Chaumet, la nouvelle directrice artistique, Claire Dévé-Rakoff, se distingue en signant la ligne HORTENSIA, une variation florale élégante et contempora­ine. Un registre inédit pour la maison.

- PAR SANDRINE MERLE

CCHEZ LES JOAILLIERS, IL Y A DEUX ÉCOLES. Certains, comme Cartier ou Chanel, choisissen­t de ne pas mettre en avant le ou les créateurs de leurs bijoux. D’autres, au contraire, incarnent leurs créations en misant sur un designer, comme Louis Vuitton avec Lorenz Bäumer ou Christian Dior avecVictoi­re deCastella­ne. Chaumet fait partie de ce clan : sa dernière collection de haute joaillerie, baptisée Hortensia, a été l’occasion d’introniser officielle­ment la nouvelle directrice artistique, Claire Dévé-Rakoff. Diplômée des Beaux-Arts, illustrat rice dans l a publicité, elle crée

d’abord des bijoux de mode, ces bijoux couture oversized réalisés dans des matières non précieuses comme la résine, le bois ou encore le Plexiglas. Dans les années 1990-2000, elle officie pour Claude Montana chez Lanvin ou encore chez JeanPaul Gaultier, avant de devenir responsabl­e du bureau de création de Chanel. « Dans la mode, tout était toujours possible au dernier moment, contrairem­ent à la joaillerie où letemps est incompress­ible », explique la créatrice, en évoquant notamment l’inlassable quête des plus belles pierres précieuses.

LA COURBE D’UN PÉTALE

Du bijou couture au bijou précieux, il n’y a qu’un pas… Diplômée de l’école de la joaillerie de la rue du Louvre, elle imagine des pièces pour des orfèvres comme Christofle et pour de nombreux joailliers comme Harry Winston. Se réappropri­er les codes d’une maison et les réinterpré­ter sans trahir l’âme de cette dernière est donc un exercice qu’elle maîtrise parfaiteme­nt… En arrivant chez Chaumet, elle en fait d’abord la démonstrat­ion avec une collection très courte de douze bagues, dontles monturesso­nt formées par le mo tif Liennéen 1977et décliné, au fil du temps, de mille et une façons. En or serti de diamant, en voilà unseul ou plusieurs qui s’entrecrois­ent de manière rigoureuse ou qui s’enroulent avec une extrême légèreté autour d’un saphir de plus de 10 carats. Le deuxième opus de Claire Dévé-Rakoff chez Chaumet, la collection de haute joaillerie baptisée Hortensia, a été son vrai baptême du feu… La maison penchant plutôt pour les noeuds et les feuillages graphiques et stylisés, la directrice artistique n’a pas eu d’archives sur lesquelles s’appuyer. La fleur se fait infiniment rare dans les cinq cent mille dessins conservés par l e joaillier, au 12, place Vendôme : elle n’apparaît qu’ici et là, sur des diadèmes naturalist­es au XIXe ou des broches dans les années 1970- 1980. Aucune n’a jamais inspiré la totalité d’une collection, alors qu’elle est un thème classique de la joaillerie et qu’elle est présente dans toutes les maisons et à toutes les époques. Elle est un motif idéal pour démontrer son savoir-faire, car il n’est pas facile de tracer la courbe gracile d’un pétale sans en figer le mouvement… L’hortensia, qui constitue un répertoire inépuisabl­e de formes, peut rivaliser avec le camélia chez Chanel, la rose chez Dior et l’orchidée chez Cartier. Claire Dévé-Rakoff a donc commencé à l’explorer tout en révélant sa patte… Elle réussit aussi bien les camaïeux de couleurs tendres composés d’opales et de tourmaline­s roses que les symphonies intenses de saphirs et de lapis-lazuli bleu vif.

INFLORESCE­NCES STYLISÉES

Elle semble à l’aise avec le figuratif comme avec l’abstrait. Tantôt elle réalise une accumulati­on voluptueus­e de micro-pétales délicats et articulés pour former une broche tendre et féminine, tantôt elle stylise les infloresce­nces grâce à un réseau de lignes géométriqu­es qui f i nissent par se transforme­r en dentelle abstraite entièremen­t articulée. La manchette ainsi réalisée a nécessité mille heures de travail et constitue la pièce maîtresse de cette collection florale émaillée de nombreuses prouesses techniques. Des prouesses techniques dont raffole Claire Dévé-Rakoff et que l’on retrouvera encore dans sa prochaine grande collection, celle de l a Biennale des antiquaire­s à venir en septembre 2014…

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 ??  ?? LA DENTELLE GRAPHIQUE du bracelet, sertie de saphirs et de lapis-lazuli aux nuances bleues (4) fait écho à la douceur de l’opale rose et blanche de la broche (5). Les courbes florales de la bague (6) soulignent une boule de tourmaline rouge de 23,83...
LA DENTELLE GRAPHIQUE du bracelet, sertie de saphirs et de lapis-lazuli aux nuances bleues (4) fait écho à la douceur de l’opale rose et blanche de la broche (5). Les courbes florales de la bague (6) soulignent une boule de tourmaline rouge de 23,83...
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LE BLEU DE LA TANZANITE se marie à celui du saphir et au blanc des diamants et de l’opale (collier et bague, 1 et 2 ). Sur la bague (3), camaïeu de rose autour d’une tourmaline de 8,61 carats.

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