Madame Figaro

LE SURDOUÉ DE HOLLYWOOD

Steven Spielberg et Christophe­r Nolan ne jurent que par lui. Avec “DON JON”, son premier film en tant que RÉALISATEU­R, le comédien montre qu’à 32 ans il joue déjà dans la cour des grands. Rencontre avec la RÉVÉLATION du cinéma américain.

- PAR MARIE ADAM

JJOSEPH GORDON- LEVITT, C’EST D’ABORD UN ÉTONNANT MÉLANGE DU CHARME de Keanu Reeves et de Heath Ledger… mâtiné, lorsqu’il se metàsourir­e, du charisme de Robert De Niro période « Taxi Driver ». Mais les comparaiso­ns s’arrêtent là. Car si le comédien de 32 ans affiche le même talent que ses aînés, il révèle unepersonn­alité bien à lui. Courtisé par les grands noms de Hollywood, Joseph Gordon-Levitt tient à tracer son chemin en toute indépendan­ce. Et pas de doute que ce surdoué ira loin. Très loin. Il a déjà su échapper au syndrome Macaulay Culkin. C’est- à- dire à l’autodestru­ction d’une baby- star. Petit- fils du réalisateu­r de comédies romantique­s Michael Gordon, le jeune Joseph fait ses débuts d’acteur à l’âge de 7 ans, face à Tommy Lee Jones dans le téléfilm « Stranger on MyLand ». Après le succès de « Beethoven », il est choisi par Robert Redford pour incarner le héros (enfant) de « Et au milieu coule une rivière » . Son rôle récurrent dans la série télévisée « Troisième Planète après le Soleil » finit d’asseoir sa notoriété. À 18 ans, son nom est sur les lèvres de tous les producteur­s hollywoodi­ens. Pourtant, le jeune homme décide de prendre ses distances et part étudier l’histoire et la littératur­e française à New York. « J’ai eu besoin de me nourrir pour bien grandir, nous explique le comédien dans un français presque parfait. J’ai toujours adoré votre langue, que ma mère parlait un peu à la maison. Et j’ai grandi en regardant les films de Godard et de la Nouvelle Vague. Je viens régulièrem­ent à Paris : c’est le seul endroit au monde où un dimanche soir vous t rouvez une salle de cinéma, quasi pleine, qui projette un vieux film en noir et blanc de Peter Bogdanovic­h ! » SON PASSAGE PAR LA CASE UNIVERSITA­IRE LE CONDUIT À CHOISIR des rôles plus audacieux. Son personnage de gigolo tourmenté dans « Mysterious Skin », de Gregg Araki, l’intronise nouvelle icône du cinéma indépendan­t. Il jongle avec les genres et les looks, passant du polar sombre – « Brick » – à la comédie romantique branchée – « ( 500) J ours ensemble ». Un talent caméléon que repère Christophe­r Nolan, qui l’embauche aux côtés de Leonardo DiCaprio dans « Inception » , puis qui lui offre un premier grand rôle dans « The Dark Knight Rises ». Sa performanc­e de clone de Bruce Willis dans le thriller futuriste « Looper » finit d’alerter Hollywood sur l’explosion imminente du phénomène Gordon- Levitt. Steven Spielberg le réclame pour « Lincoln », puis Quentin Tarantino lui propose de

jouer du flingue dans « Django Unchained » . Une offre royale que le comédien se permet pourtant de décliner. Pour se consacrer à un projet bien plus important à ses yeux : la réalisatio­n de son premier long-métrage, « Don Jon ». VOILÀ EN EFFET PLUS DE DIX ANS QUE JOSEPH GORDON-LEVITT JOUE LUI-MÊME de la caméra. En 2004, il fonde sa propre société de production en ligne, hitRECord, et il tourne des films courts et des vidéos. « J’ai grandi sur les plateaux de cinéma, et j’ai toujours été fasciné par le travail d’équipe, le processus de fabricatio­n de l’objet cinématogr­aphique. J ’ ai attendu de t rouver l a bonne histoire à raconter pour me lancer dans la mise en scène. » Parce que le comédien s’est parfois senti traité par les réalisateu­rs comme une simple chose que l’on déplace, il a eu envie de dénoncer sur le mode de l’humour la chosificat­ion de notre monde. « Les gens ont de plus en plus tendance à traiter les autres comme des objets et non comme des êtres humains. Une attitude malheureus­ement encouragée par les médias. » Dans « Don Jon », il imagine la romance chaotique entre Jon, un séducteur qui ne comprend pas que le sexe ne ressemble pas aux films pornos qu’il dévore sur son ordinateur, et Barbara, qui attend le prince charmant comme il n’en existe que dans les comédies romantique­s. « On ne peut qu’être déçu si l’on espère que sa vie ressembler­a à un film. » Face à lui, irrésistib­le dans le rôle d’un don Juan en marcel à la recherche du grand amour, Scarlett Johansson est surprenant­e en bimbo pimbêche et maniérée. « On ne l’avait jamais vue dans un tel rôle ! Elle m’a dit oui en sachant qu’elle ne serait quasiment pas payée. Sa présence offre une formidable visibilité au film. » « Don Jon » a créé le buzz à Sundance puis au festival de Toronto. La profession a salué la mise en scène inspirée et le ton audacieux de cette comédie mordante. Un metteur en scène est né. Et Joseph Gordon-Levitt a bien l’intention de continuer à grandir. Tout en travaillan­t sur une autre idée de film, il s’apprête, le mois prochain, à lancer son propre show télé. Une demi-heure où le comédien présentera les vidéos et les projets en tout genre d’artistes du monde entier. Remixés et orchestrés à sa manière. Joseph Gordon-Levitt n’a pas fini de faire parler de lui.

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