« Vivre ensemble », par Matthieu Ricard.
ENSEMBLE
À l’orée de l’année nouvelle, nous savons que notre vie sera, comme par le passé, un mélange de joies et de peines, d’ombres et de lumières. Nous nourrissons cependant l’espoir d’un monde meilleur et d’accomplissements qui font que la vie mérite d’être vécue. Une enquête menée aux États-Unis a montré qu’une personne sur cinq ressent souvent un profond sentiment de solitude, se sent négligée et dit n’avoir personne à qui se confier ou demander de l’aide. Cet isolement est source de nombreux maux. À l’opposé, ceux qui bénéficient de connexions sociales multiples et positives jouissent d’une meilleure santé mentale et physique, sont moins sujets aux dépendances (tabac, alcool, drogue) et vivent, en moyenne, plus longtemps. PRÊTONS DONC ATTENTION À CEUX QUI ONT BESOIN DE NOTRE PRÉSENCE et de notre sollicitude. Alors que l’on déplore l’individualisme de notre temps, la France compte 12 millions de bénévoles, 18% dela population, le pourcentage le plus élevé d’Europe. Plus de 3 millions consacrent au moins deux heures par semaine à des activités solidaires. Le rapport 2013 sur le bien-être dans les pays de l’OCDE* indique que la crise a fait émerger de nouvelles formes de solidarité. Un plus grand nombre de personnes se portent volontaires pour venir en aide aux plus démunis, et la famille constitue un « filet desécurité » deplus en plus important. Pour autant, si l’on veut que les choses changent davantage, IL FAUT OSER L’ALTRUISME. Oser dire que l’altruisme véritable existe et qu’il peut être cultivé par chacun de nous. Oser l’enseigner dans les écoles pour permettre aux enfants de réaliser leur potentiel de bienveillance et de coopération. Il faut aussi oser affirmer que l’économie ne peut se contenter de la voix de la rationalité fondée sur l’intérêt personnel : elle doit également ÉCOUTER LA VOIX DE LA SOLLICITUDE. Finalement, il nous incombe de prendre sérieusement en compte le sort des générations futures et de modifier la façon dont nous exploitons la planète qui sera la leur. Non seulement la coopération a été l’architecte de quatre milliards d’années d’évolution du vivant, mais elle constitue le meilleur espoir pour l’humanité.