FIXER LES LIMITES
rapport apaisé entre les sexes. J’ai dit à mon fils : “Tu dois te comporter comme un chevalier”. Et j’ai lu Cyrano de Bergerac avec lui. Il a adoré. » Transmettre des valeurs fortes, mais de manière ludique et en rusant un peu, même si elles travaillent dix heures par jour : tel semble être le défi que doivent relever toutes les mères d’aujourd’hui. La galeriste Nathalie Obadia a utilisé ces méthodes avec son fils Maxime, qui a 25 ans : « Très tôt, j’ai ménagé des séances avec lui, à la maison, du temps partagé pour nous deux exclusivement, résume- t- elle. On ne regardait pas la télévision, mais on visionnait “les Misérables”, tous les films de Pagnol, ceux de Jean Renoir et d’Ingmar Bergman. » Elle a également confisqué les manettes et les consoles en constatant les dégâts causés sur Maxime quand il en abusait, à l’adolescence : « Je suis pour les rituels : aller au concert, aller dans les musées, former le goût. Mais attention, je suis très stricte. Au moindre débordement, je recadre ! » Sévère mais juste, tolérante, calme, ferme, attentive, non intrusive, équilibrée : le portrait-robot de l a bonne mère donne l e t ournis. Comme disait Freud aux parents : « De toute façon, quoi que vous fassiez, vous ferez mal. » Restent les trucs, les recettes, les modes d’emploi échangés entre femmes sur le fil de la crise de nerfs. La styliste Isabel Marant croit aux vertus de la nature : « Tal a 11 ans. Il est très sportif. Il n’est pas du tout accro aux écrans. C’est sans doute parce que nous l’emmenons dans notre “cabane”, une maison en bois écolo à Fontainebleau, chaque week-end depuis qu’il est tout petit. Je crois que cela a été fondateur. Du coup, il apprécie les arbres, la vie à l’air libre. » Dans un autre r egistre, l a r omancière Pauline Dreyfus a établi une complicité littéraire qui la lie à Ulysse, son fils aîné : « Quand je le vois lire jusqu’à trois heures du matin, s’amuse-t-elle, je ne peux pas lui ordonner d’éteindre la lumière, j’étais exactement comme lui à son âge ! » Chacune a son truc pour cimenter la relation. Macha Makeïeff, mère de deux garçons, de 18 et 29 ans, insiste, elle, sur la confiance dans la durée : « Je crois à la bonne distance et à l’harmonie dans les rapports, dit-elle. Il ne faut pas être une mère dévorante avec les adolescents. C’est délicieux, après tout, l’énigme de ces jeunes gens. Et puis, n’oublions pas qu’ils vont s’envoler. C’est ce que nous avons vécu aussi avec nos parents. Nos fils sont pensionnaires, et nous ne sommes qu’un épiphénomène dans leur histoire qui est longue. »