PRUNE NOURRY ARTISTE HORS CADRE
UNE ARMÉE DE FILLES ENFOUIE CHINE, UN SPERMBAR À NEW YORK, DES DÎNERS PROCRÉATIFS: LA PLASTIICIENNE EXPLORE LA BIOGÉTIQUE AVEC DES CEUVRES À SA DÈMESURE, ELLE POUSSE À PRÉSENT LES MURS DU MUSÉE CUMET. VISITE GUIDÉE.
UN ATELIER PERCHÉ AU FAÎTE D’UNE SPIRALE de béton parisien, niché, telle une bulle insoupçonnable, sous une verrière. Ambiance de préparatifs d’exposition – précise, organisée et interrogative. La structure d’une future tête de bouddha attend ses atours de plâtre et de polystyrène. Ses dimensions inquiètent Prune Nourry – aura-t-on suffisamment de recul pour l’appréhender, une fois qu’elle sera installée sous la coupole du musée Guimet ? Le recul, question centrale pour cette artiste exigeante qui travaille depuis dix ans le creuset de son art, centré autour de la bioéthique et de la sélection procréative. Pour fêter cet anniversaire, le musée national des Arts asiatiquesGuimet, lui offre aujourd’hui une carte blanche. Et Prune, poigne de fer et yeux de biche, a prévu de faire dialoguer les oeuvres permanentes du lieu avec ses sculptures. Mais pas seulement. Ne pas croire non plus que cela sera calme – la plasticienne excelle à perturber les silences, même millénaires. À Guimet, temple asiatique parisien, sa présidente, Sophie Makariou, raconte le projet tsunami qui envahit le cadre et l’institution depuis près d’un an : « Normalement, les cartes blanches sont cantonnées à la rotonde, mais là, tout déborde ! » Il a fallu éviter que des suspensions ne fassent s’effondrer les plafonds, mesurer les espaces, inventer sans cesse.
DISCOURS CHOC
Cette fois encore, la sculptrice a emmené tout le monde avec elle. Avant de bousculer les services muséaux, elle avait conquis un atelier chinois pour réaliser son armée en terre cuite de 108 collégiennes grandeur nature, ses « Terracotta Daughters » (2013), en réponse à l’armée de soldats du premier empereur. Ces guerrières, montrées de Shanghai à Paris, en passant par Zurich, New York et Mexico, dénoncent la politique chinoise de l’enfant unique. Elles sont désormais enterrées en Chine, dans un lieu tenu secret jusqu’en 2030, année où le déficit de Chinoises devrait connaître son apogée. On retrouvera leurs huit sculptures originales dans l’exposition, de même que les « Holy Daughters » (2010), sculptures hybrides au corps de jeune fille et à la tête de vache, que Prune avait disséminées dans les rues de Delhi pour souligner le paradoxe entre la femme, source de fécondité peu considérée, et l’animal sacré, symbole de fertilité. À ses débuts, l’indisciplinée disposait ses « Bébés domestiques » – corps