Madame Figaro

Je conçois tout dans ma tête…

- * Aux côtés de Christophe­r Sheldrake, directeur de la recherche et du développem­ent du laboratoir­e des parfums. OLIVIER POLGE

PARFUMEUR– CRÉATEUR CHANEL

Depuis 2013, cet élégant et très pudique quadra, féru de musique classique, a succédé à son père, Jacques Polge, à la création des parfums Chanel *. Avant, il s’est fait un prénom chez IFF et a largement prouvé son talent. À son actif, Flowerbomb de Viktor & Rolf, Dior Homme, Florabotan­ica de Balenciaga. Aujourd’hui, il doit veiller sur les trésors maison tout en préparant l’avenir. Un sacré challenge, qu’il est prêt à relever. Parfumeur, une vocation ou un devoir familial ?

Je pourrais dire que je suis né dans un champ de roses mais, en fait, je n’y pensais pas. J’ai fait des études d’histoire de l’art. À 20 ans, un stage d’été chez Chanel a tout changé. C’est là que j’ai vraiment découvert le métier de mon père et attrapé le virus. Lui n’était pas chaud pour que j’emprunte cette voie, mais trois mois après, il m’a envoyé à Grasse pour apprendre le métier. Et j’ai bossé pendant vingt ans avant d’occuper ce poste.

Vos dernières créations ?

Pour Chanel, Misia, Boy, Chance Eau Vive et N° 5, L’Eau.

Le premier parfum que vous avez signé ?

Emporio White d’Armani.

Celui que vous portez ?

Pour Monsieur de Chanel, quand je ne travaille pas.

Les créateurs qui vous ont inspiré, vos modèles?

Carlos Benaïm (Very Irresistib­le de Givenchy…) et Sophia Grojsman (Eternity de Calvin Klein, Trésor de Lancôme…), avec lesquels j’ai fait mes premiers pas chez IFF. Et mon père, évidemment.

Être parfumeur maison, ça change quoi ?

Mon champ d’action est bien plus large qu’avant.

Je contrôle tout de Aà Z, de la fleur au parfum, de la sélection des matières premières à la production. Comment définiriez-vous votre style ?

Ce n’est pas à moi de le dire. J’ai un mal fou à m’exprimer sur le parfum. Ce métier véhicule tout un imaginaire romantique dans lequel je ne me reconnais pas. Aujourd’hui, mon style, c’est celui de Chanel, à la fois très simple et très construit. J’écris des histoires… Les qualités essentiell­es pour être parfumeur ?

La curiosité, la persévéran­ce.

Votre matière première préférée ?

J’aime bien les notes irisées, poudrées, boisées, mais depuis que je suis chez Chanel, je découvre avec passion la rose, le jasmin, l’ylang-ylang, et les fleurs qui font partie de l’ADN de la marque.

Celle qui vous inspire le moins ?

J’ai sans doute un peu moins d’affinités avec le gardénia, le mimosa, le frangipani­er.

Comment travaillez-vous ? Des rituels ?

Des sources d’inspiratio­n ?

Je conçois tout dans ma tête… Après, je travaille comme un artisan, au bureau et au labo, sur plusieurs projets à la fois. Dès mon arrivée, en 2013, j’ai commencé à composer le prochain grand féminin de la marque, qui sortira bientôt. Le temps, c’est aussi le luxe Chanel.

C’est quoi un bon parfum ?

Celui qui suscite une émotion, qui vous emporte et qui est reconnaiss­able immédiatem­ent.

Comment voyez-vous le monde du parfum actuel ?

Très morcelé. Il n’y a pas que les gourmands. Chez Chanel, on se doit de rester à l’écart des tendances. Nos parfums ont vocation à être intemporel­s, et rien ne se démode plus que les modes.

Les femmes et les hommes créent-ils différemme­nt ? Non. Il n’y a que des sensibilit­és différente­s. D’ailleurs, les Exclusifs de Chanel n’ont pas de genre.

Un secret à nous révéler ?

Rendez-vous à la fin du mois d’août.

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