Madame Figaro

Métropolit­ain, par Marc Lambron.

- par Marc Lambron

Vu la date où paraissent ces lignes, vous n’imaginez tout de même pas que je vais vous entretenir d’événements imminents impliquant des milliers d’urnes – je ne parle pas d’inhumation­s, mais d’élections. Par surcroît, le CSA serait capable de soustraire cette chronique de mon temps de parole à « Madame Figaro ». Non, nous allons cette semaine partir en maraude pour cueillir des pâquerette­s, ce qui me permettra d’évoquer un vieux film en regardant le plafond. J’ai revu pour vous « les Parisienne­s », un long-métrage à sketchs de 1962, coréalisé par Marc Allégret, Jacques Poitrenaud, Claude Barma et Michel Boisrond. Il s’agissait alors de montrer au public, au cas où il l’aurait oublié, que les citoyennes de la capitale sont à la hauteur de leur réputation, élégantes, mutines, tête en l’air, amusantes, délicates, trompeuses, irrésistib­les. Cela, il suffit de se promener aujourd’hui sur le boulevard Haussmann pour le vérifier, car rien n’a changé. Bon, on voit ici que je suis traversé par une bouffée d’optimisme électoral.

Il s’agit donc d’un film où toutes les actrices ont l’air d’être dessinées par Jean-Gabriel Domergue, ce qui sied à Françoise Arnoul, Dany Saval, Françoise Brion et Dany Robin. C’est curieux, toutes ces Françoise et ces Dany. Un tic d’époque, sans doute. Le sketch qui a retenu mon attention, c’est « Sophie », réalisé par Marc Allégret et coscénaris­é avec Roger Vadim. Ces deux-là avaient connu André Gide, mais en 1962 ils mettent en scène Catherine Deneuve et Johnny Hallyday pour une brève idylle yéyé. Les deux jouvenceau­x avaient alors 19 ans. Le rockeur donne l’aubade à l’actrice en lui chantant « Retiens la nuit », titre signé par Aznavour et Garvarentz, puis il y a une scène de twist sur la chanson « Samedi soir », et c’est tellement mignon de voir Deneuve (habillée par Louis Féraud) et Johnny se déhancher dans toute l’éclatante beauté de leur jeunesse. C’est comme la promesse, l’aube d’une longue journée dont ils ne connaissen­t pas les heures futures.

Le noir et blanc superbe est dû à l’opérateur Armand Thirard, qui officiait déjà à l’époque du muet. Tandis que les adultes sont incarnés par Élina Labourdett­e, déjà mariée avec Louis Pauwels, et le latin lover José Luis de Villalonga. Cela m’a remis en mémoire un mot atroce de François Mauriac. Un peu gigolpince, Villalonga avait épousé une ingrate mais richissime Britanniqu­e, belle à millions, qui lui avait donné deux enfants. Lors d’un dîner chez le couple, on présente les bambins à Mauriac. L’écrivain se penche à l’oreille de Villalonga et lui murmure : « On voit qu’ils ont été faits sans plaisir. » Bon scrutin !

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Catherine Deneuve

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