Madame Figaro

VALÉRIE LEMERCIER

“Chez les réalisatri­ces, l’exigence est vite assimilée à des caprices”

- « Marie-Francine », de et avec Valérie Lemercier, est actuelleme­nt en salles.

COMMENT ÊTES-VOUS DEVENUE COMÉDIENNE ? Adolescent­e, j’ai réussi un petit concours en art dramatique. Mes parents étaient sortis. Pour leur annoncer mon admission, j’ai écrit « oui » sur la buée d’une vitre. J’ai ensuite lu des tas de pièces au lit. Mais je n’étais ni soubrette ni jeune première. Dans « Milou en mai », de Louis Malle, mon premier film en tant que comédienne, j’incarnais une femme de 60 ans. Dans « Marie-Francine », je joue, au fond, une petite fille devant laquelle sa mère, pour la réveiller, agite la marionnett­e de Guignol.

QUAND VOUS ÊTES PASSÉE À LA RÉALISATIO­N, QUEL A ÉTÉ LE DÉCLIC ?

La publicité. Dans les années 1990, j’ai réalisé quarante spots : pour les rasoirs Bic, la Française des jeux, etc. Une école formidable. Je suivais tout de A à Z… Daniel Toscan du Plantier est venu me chercher pour « Quadrille ». Peu à peu, j’ai compris ce que j’aimais : l’écriture et le montage. Je ne regarde jamais ni l’écran de contrôle ni les rushs. Je dirige mes acteurs en face à face, et au bruitage je fais même certains sons ! SUR LE PLATEAU, VOUS MONTREZ-VOUS VIRILE ? Non, plutôt tactile, affectueus­e, maternante ; d’ailleurs Denis Podalydès m’appelle maman. Je ne pique jamais de colère avec mes acteurs, mais je peux m’énerver quand un accessoire manque. Je m’habille aussi en blouse blanche, même à la post-production, une protection qui m’isole. Ou alors en robe et talons. Je veux me sentir moi-même. ENTRETENEZ-VOUS UNE COMPLICITÉ

AVEC VOS CONSOEURS ?

Quand j’ai vu « le Goût des autres », un de mes films préférés, j’ai écrit une lettre à Agnès Jaoui, chose que j’ai faite deux fois dans ma vie. Mais on ne se fréquente que dans les festivals. J’ai croisé Marion Vernoux, dîné une fois avec Valeria Bruni Tedeschi, dont j’admire le travail, et finalement davantage découvert Valérie Donzelli (« Main dans la main ») lors de la promotion que pendant le tournage. VOS BUDGETS SONT-ILS MOINDRES

QUE CEUX DES HOMMES ?

Non, et, en plus, sur « Marie-Francine », j’ai dépassé d’une semaine. En revanche, je suis payée de la même façon que les acteurs. Sauf que j’ai passé trois ans à écrire et à monter. Alors qu’eux viennent quinze ou vingt jours. AVEZ-VOUS PARFOIS CONNU LE SEXISME ?

Oui... Sur un plateau je mets beaucoup d’énergie à faire des blagues, et on peut parfois me le reprocher... Chez les réalisatri­ces, l’exigence est aussi assez vite assimilée à des caprices. Mais les filles ont tellement peu qu’elles donnent plus. Elles obtiennent ce qu’elles veulent, même si elles doivent le demander trois fois.

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