Madame Figaro

ANNE TERESA DE KEERSMAEKE­R Danse avec Bach

- PAR BERNARD BABKINE

Chaque année, l’Opéra de Paris invite une compagnie étrangère. Cette saison, c’est Anne Teresa De Keersmaeke­r : elle présente, avec ses danseurs de Rosas et avec le B’Rock Orchestra, sous la direction de la violoniste Amandine Beyer, Les Six Concertos brandebour­geois, une pièce d’une saisissant­e beauté, en totale harmonie avec la musique de Bach.

Madame Figaro. – Pourquoi êtes-vous devenue chorégraph­e ? Anne Teresa De Keersmaeke­r. – J’ai eu la chance, petite fille, d’avoir une jeune femme professeur très inspirante qui nous enseignait toutes sortes de choses : du classique, de l’impro, de la musique… Plus tard, quand je suis devenue danseuse, j’ai eu l’envie de développer mon propre langage, de m’exprimer autrement.

Et vous créez vos premières pièces pour des femmes… Oui, avec Fase, Four Movements to the Music of Steve Reich, par exemple, car la musique minimalist­e et répétitive de Steve Reich m’inspirait un duo de femmes. C’était comme une évidence de maintenir l’unité à partir de mon propre corps. Ce fut ensuite Rosas danst Rosas, pour quatre danseuses cette fois ! Ensuite viennent les danseurs… Plus tard, à partir de Achterland, vint en effet le défi de développer un vocabulair­e masculin, soit un autre langage, une autre énergie, une gestuelle en partie étrangère à mon corps. Vous adorez Bach…

C’est un compositeu­r-clé. Toute son oeuvre est magnifique. Il y règne une telle clarté de structure, liée à un tel sens du détail ; c’est comme une architectu­re en mouvement. C’était un challenge que de créer une chorégraph­ie qui se mesure à une telle hauteur d’inspiratio­n. Je l’ai tenté avec

Les Six Concertos brandebour­geois : associer l’abstractio­n extrême à la réalité concrète du mouvement, pour créer un élan vital et jubilatoir­e.

Danser à l’Opéra Garnier, c’est une émotion particuliè­re ?

Il est extrêmemen­t rare de trouver une salle de cette taille-là, où l’on garde pourtant une belle proximité avec les spectateur­s. La scène y est encore en pente, à l’ancienne… La pente est comme une invitation à communier avec le public, à se l’attacher. J’aime énormément cette salle.

La danse peut-elle changer le monde ?

Ce serait bien naïf ou prétentieu­x d’y prétendre. Néanmoins… être réunis dans un même espace, partager des moments de beauté qui invitent à la réflexion, ce sont des moments utiles et même nécessaire­s. La danse présente le corps dans sa forme la plus intense, c’est la base de toute communicat­ion.

Les Six Concertos brandebour­geois,

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