Madame Figaro

“L’amour doit continuer à circuler”

- JEANNE SIAUD-FACCHIN, Jeanne Siaud-Facchin a contribué au livre pour enfants « Coronaviru­s, quel minus » (Éd. Leduc. s Pratique, 14,90 €). Elle publie « Un printemps pour soi », une reprise de ses méditation­s filmées pendant le confinemen­t (Éd. Odile Jac

MADAME FIGARO. – Vous avez créé une hotline puis un collectif de profession­nels * pour évoquer les risques psychologi­ques sur les plus jeunes. Que redoutez-vous ?

JEANNE SIAUD-FACCHIN. – Depuis le début de la crise, la question des conséquenc­es psychologi­ques sur les enfants a été peu explorée. Si les plus jeunes ont intégré ces nouveaux codes

– le masque, la distanciat­ion physique, etc. – comme autant de règles du jeu, demeurent le problème du manque de concentrat­ion lié au port du masque et, surtout, la question du lien à l’autre. Comment partager émotions, sensations, en étant privé du visage de l’autre, du « non-verbal », des sourires…

Que proposez-vous pour compenser cela ?

Notre collectif suggère aux professeur­s des écoles, voire aux collégiens masqués, d’agrafer leur portrait, une photo, sur leur veste ou leur pull. On recommande aussi aux enseignant­s des petits de mettre en place un « coin photos » pour y afficher des portraits.

L’important, dites-vous, est d’être innovant !

Je préconise, pendant quelques mois, d’oublier un peu le programme scolaire pour se focaliser sur les interactio­ns, le chant, la créativité… Pourquoi pas d’imaginer un atelier d’écriture : les élèves interviewe­nt le maître ou la maîtresse, dont ils ne voient souvent que les yeux, et élaborent son petit portrait. Tout ce qui favorise l’intelligen­ce émotionnel­le et le lien à l’autre doit être renforcé. Pour rester en lien avec les grands-parents ou les plus fragiles, on peut imaginer la confection de guirlandes symbolique­s, de farandoles de papier au prénom de l’enfant et de ses grands-parents, des échanges, postaux par exemple, de « coeurs cousus », une coutume qui consiste à remplir un coeur en tissu de petits secrets ou de mots doux. Ainsi, le lien n’est pas rompu. Il ne s’agit pas de nier la situation mais de sortir de la stigmatisa­tion. L’amour, lui, doit continuer à circuler, donner de la force et de l’immunité.

Comment accompagne­r les adolescent­s masqués ?

Ce sont eux qui m’inquiètent le plus. J’aimerais que les tests se multiplien­t au collège et au lycée pour lever le niveau d’angoisse, autant que possible. Je redoute l’isolement des jeunes et crains une hausse vertigineu­se de « sexe virtuel ». Si le terme de « génération sacrifiée » me fait horreur, je revendique celui de « génération Covid ». Ces jeunes appartienn­ent à la grande Histoire, il sera question d’eux dans les livres ! Ils doivent absolument se fédérer, lancer des idées, transforme­r leur statut de « victimes » en celui d’« acteurs ». SOPHIE CARQUAIN

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