Interview. Lumière dans les salles obscures, avec Elisha Karmitz.
FAIRE DIALOGUER LE CINÉMA AVEC D’AUTRES DOMAINES POUR PENSER ENSEMBLE LE MONDE DE DEMAIN, TELLE EST L’AMBITION DU MK2 INSTITUT. ELISHA KARMITZ, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPE MK2, PRÉCISE LE SCÉNARIO.
LA VIE DES IDÉES
Les historiens Patrick Boucheron et Michel Pastoureau, le philosophe Charles Pépin, le physicien Christophe Galfard, l’auteure Hélène Cixous : tous ont accepté l’invitation du MK2 Institut, nouveau projet citoyen du réseau fondé par Marin Karmitz en 1974. Dès la réouverture des salles ou sur une plateforme digitale qui reprendra, dès décembre, les captations des rendez-vous passés, les curieux découvriront les conférences de ces libres penseurs, autour de grandes thématiques et de questions qui agitent nos sociétés. « Nous avons besoin de montrer à la jeunesse, dont la pratique de la culture est très liée au digital, qu’elle peut avoir accès à des savoirs de qualité en ligne ou dans un contexte décomplexé. Elle peut voir Star Wars et assister à une conférence de François Sureau sur la liberté au même endroit, explique Elisha Karmitz, directeur général du groupe MK2. Nous essayons de créer un contexte fertile pour échanger des idées et des arguments, plutôt que de polémiquer en 240 signes sur les réseaux. » La plateforme sera ainsi également fournie de textes et de podcasts.
DES NUANCES DE GRIS
En 2021, le MK2 Institut prévoit de laisser plus d’espace aux cinéastes et aux artistes contemporains dans la programmation. L’écologie, le racisme ou la place des femmes seront aussi plus largement abordés. « Il faut prendre le temps de mettre les choses sur pied pour aller plus loin dans la réflexion. Nous voulons susciter des débats nuancés, fertiles, sans impasse. Si les grands médias réagissent à chaud à certains sujets, le rôle de l’Institut est d’y revenir a posteriori, tête froide, en trouvant les nuances de gris pour que le public se fasse sa propre idée. Créer des débats où les contraires se supportent est le propre d’une démocratie saine. » Afin que les contenus et les regards circulent, MK2 proposera ainsi aux autres salles de cinéma et de spectacle de retransmettre en direct ses conférences et master class en 2021.
L’ADN MK2
Depuis son ouverture, le réseau utilise aussi ses salles pour qu’elles soient le lieu de débats politiques et sociaux, pour mettre en avant les sciences humaines et sociales. Il y a quinze ans déjà, lorsqu’il débutait, Elisha Karmitz lançait ses Cinéphilo avec Ollivier Pourriol. « Depuis quelques années, entre la montée des gouvernements d’extrême droite ou l’omniprésence des plateformes digitales et des algorithmes, des choses changent dans la vie politique et culturelle. Nous avons plus que jamais besoin d’outils de réflexion pour résister. » Corollaire de l’Institut, MK2 Curiosity, lancé pendant le premier confinement, fait ainsi son retour en ligne fin novembre pour proposer gratuitement, chaque semaine, des contenus rares autour d’une même problématique (courts, documentaires, films) : « C’est un cabinet de curiosités qui permet de remettre des choses de notre passé en perspective pour penser ensemble notre présent et notre futur. »