Un thriller implacable
FéE DU LOGIS DéVOUéE à SA
FAMILLE, qui est sa colonne vertébrale, Karine mène une vie sans histoires, entre un mari géomètre, avec lequel elle forme un couple solide, une fille, Lisa, en pleine crise d’adolescence (look gothique, discours rebelle, provocations multiples) et un fils, Maxime, qui fait sa fierté. Mais voilà que le jeune homme, qui vient de réussir Polytechnique, la réveille en pleine nuit, l’haleine chargée d’alcool et la chemise ensanglantée, pour lui avouer qu’il a renversé une jeune fille avec la voiture et qu’il a fui, abandonnant la dépouille sur le bord du chemin… Ainsi commence le deuxième roman de Laurence Lieutaud, qui possède sans conteste l’art du cliffhanger et de la construction au cordeau : Le Choix du roi se déploie de façon toute cinématographique, suivant un jeu de flash-back et de sauts dans le temps
(le jour d’avant, le jour d’après, le jour de l’enterrement…) qui imprime au texte le rythme d’un thriller psychologique impossible à lâcher. L’auteure excelle tout autant à donner chair à ses différents personnages, sans avoir besoin de plus d’une poignée d’observations pour croquer, de façon très vivante, les caractères, milieux sociaux et dynamiques entre les générations. Si Karine, dont l’existence banalement heureuse vole en éclats, constitue le fil rouge de l’intrigue (détentrice d’un secret aussi impossible à garder qu’à divulguer, elle est la seule dont on adopte directement la perspective, à la première personne), on suit avec un intérêt tout aussi soutenu les trajectoires de la victime, de sa mère à jamais brisée, de Lisa qui grandit en l’espace d’un été, de Maxime qui se révèle en ne révélant rien, jusqu’à une fin aussi implacable que le destin dans les tragédies grecques.