LA CHRONIQUE DE ● COLOMBE SCHNECK
DANS UN ENTRETIEN POUR LE MAGAZINE THE PARIS REVIEW, l’écrivain britannique Ian McEwan confie combien la lecture des grands écrivains américains a été une révélation : « Le roman américain me semblait si vibrant en comparaison de son homologue anglais de l’époque. Tant d’ambition, de puissance, et une folie à peine dissimulée. » Réunis dans la collection Quarto, les écrits américains de Philippe Labro sont l’illustration de notre attirance pour cette littérature. Elle paraît seule capable de transcrire un monde où tout est possible, la nature immense et les personnages hors du commun. Ces textes racontent une ambition, cela pourrait être celle de devenir un écrivain américain, mais Philippe Labro ne s’est pas contenté d’écrire des romans, il a vécu, tel un personnage, à l’intérieur même d’une épopée romanesque. Âgé de 20 ans alors qu’il est en route vers le Colorado, il lit le philosophe Henry David Thoreau : « Comment vivre ? Comment obtenir le plus de vie possible ? »
Il a déjà traversé la guerre, ses parents résistants cachaient des familles juives, il passe une première année de collège aux États-Unis, va passer l’été à faire le bûcheron dans les Rocheuses, a failli être tué par des malfrats en « allant avec sa chance », comme on définit en Amérique latine ceux qui font de l’autostop, a écrit pour le journal universitaire, et a été aussi l’objet d’un portrait dans ce même journal. Les photos illustrent un récit à la fois inventé, dans le sens où il paraît vécu pour être raconté, et vrai, les quatre frères en petits garçons se tenant par l’épaule, l’écrivain journaliste, réalisateur, patron de radio, posant avec des actrices made in Hollywood, de grands espoirs et des désastres, un roman à l’américaine, tel que le réclame McEwan. ●