MozarT pris au jeu
EN ALLANT VOIR COSì FAN TUTTE, DE MOZART, mis en scène par Dmitri Tcherniakov, vous ne verrez ni costumes d’époque, ni perruques poudrées, ni jeunes filles et jeunes hommes en pleine découverte de l’amour et de ses jeux. C’est que Dmitri Tcherniakov aime bousculer les codes, insuffler un souffle nouveau dans de grandes oeuvres classiques, quitte à provoquer parfois quelques tempêtes et controverses sur les plus grandes scènes internationales. On doit à ce fou d’opéra La Traviata à la Scala de Milan, Carmen à Aix-en-Provence ou Le Hollandais volant à Bayreuth… Il chahute allègrement le livret de Da Ponte et transpose l’action de nos jours dans un vaste loft qui, le temps d’un week-end, accueille des couples qui ont déjà bien vécu, pas farouches et adeptes de l’échangisme. La quête d’amour devient alors une sorte de reconquête d’un passé libertin dans un décor unique et sobre, qui au fil de la soirée laisse la place en fonction des lumières, du doré au blanc cruel, à une sorte de laboratoire qui emprisonne ces bêtes de sexe entre plaisir, cruauté, tentation et domination. Christophe Rousset à la tête des Talents lyriques, accompagné du choeur Stella Maris, fait scintiller la partition de Mozart, tandis que les interprètes (plus âgés que dans les distributions classiques) apportent une tonalité plus sombre à ce Così fan tutte proche de Sade ou de Choderlos de Laclos et révélateur des démons intérieurs qui habitent les personnages.
« Così fan tutte », mise en scène Dmitri Tcherniakov, direction musicale Christophe Rousset, jusqu’au 22 février, au Châtelet, à Paris. chatelet.com