Madame Figaro

Guillaume Henry et Monica Sabolo

“Deux façons de dire le monde, une même étincelle”

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QUEL REGARD PORTEZ-VOUS L’UN SUR L’AUTRE ? GUILLAUME HENRY. – Quand vous m’avez demandé de choisir un écrivain, j’ai tout de suite pensé à une femme. Je trouve qu’elles racontent mieux le rapport à l’amour, la famille, l’enfance, la filiation, l’ordinaire… Ce que j’aime en particulie­r chez Monica, c’est son style à la fois pudique et sans filtre, son élégance et sa fantaisie. Rien n’est bien, rien n’est mal, tout est secret et à découvert.

J’ai adoré son troisième roman, Tout cela n’a rien à voir avec moi, tout comme son dernier, La Vie clandestin­e, que j’assimile à la plus fine des broderies.

MONICA SABOLO. – Je trouve qu’il se dégage de Guillaume, et de sa mode chez Patou, quelque chose de très doux et joyeux à la fois. Ses silhouette­s sont d’une élégance folle, l’air de rien, mais avec une vraie personnali­té, une signature. Tout paraît facile alors que c’est très travaillé.

EXISTE-T-IL, SELON VOUS, DES LIENS

ENTRE LA MODE ET LA LITTéRATUR­E ?

G. H. – Le chemin qui aboutit à la création d’un livre ou d’une collection est assez proche. Ce sont des canevas dans lesquels on s’égare, on revient, on abandonne, on juxtapose, on coupe, on colle. Nos deux discipline­s racontent aussi une histoire. Dans ma mode, j’imagine toujours une femme et je la suis dans un récit que j’invente.

M. S. – Il faut, à l’origine, la même étincelle, je pense, pour dessiner des vêtements ou démarrer un roman. Quelque chose qui ressemble à une intuition, un élan, un saut dans l’inconnu. Ce sont deux façons de raconter le monde. Et la mode m’aide aussi à caractéris­er mes personnage­s. Dans mon livre Crans-Montana, par exemple, dont le récit se déroule dans les années 1960, j’ai mené beaucoup de recherches sur les looks de l’époque.

CONNAISSEZ-VOUS LE SYNDROME

DE LA PAGE BLANCHE ?

G. H. – Non, mais je peux me lasser d’une collection en cours d’élaboratio­n. Alors, je laisse un peu reposer et je retombe amoureux de mon travail.

M. S. – J’ai souvent l’impression que le roman est une pelote enroulée à l’intérieur de moi. Je dois simplement tirer le fil. Mais je connais aussi ces moments angoissant­s, durant lesquels je me dis que je n’écrirai plus jamais. Et puis, soudain, d’une façon secrète, une idée naît et un nouveau livre émerge.

Guillaume Henry est directeur artistique de Patou. Dernier ouvrage de Monica Sabolo : « La Vie clandestin­e », Éditions Gallimard.

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