Madame Figaro

FARIDA KHELFA

Ex-top-modèle, actrice et réalisatri­ce “Les talons ont été synonymes de mon émancipati­on parisienne”

- Farida Khelfa est l’auteure d’« Une enfance française », Éd. Albin Michel.

COMMENT A DÉBUTÉ VOTRE HISTOIRE AVEC LES TALONS ? J’ai adopté les talons dès mon arrivée à Paris, à l’âge de 16 ans. C’est Christian Louboutin, alors âgé de 15 ans, qui m’a offert ma première paire de stilettos rouges qu’il avait achetée à Londres. Je les ai portés jusqu’à épuisement, les talons se transforma­nt peu à peu en banane épluchée. Mais j’ai tout de suite eu une passion pour ces derniers et j’ai su instantané­ment marcher avec.

VOTRE MÈRE ÉTAIT-ELLE PLUTÔT ESCARPINS, BASKETS OU MOCASSINS ? Elle était tout le temps à plat. Ma mère avait neuf enfants. Elle ne se maquillait pas, n’a jamais porté de talons, elle était d’une grande rigueur.

AVEZ-VOUS TOUJOURS ÉTÉ PERCHÉE ? Le plus souvent, oui, mais j’aime aussi beaucoup les chaussures d’homme. Chez moi, c’est soit escarpins stilettos, soit Golf Weston, pas d’entre-deux, jamais de demi-mesure.

LES TALONS, ENTRAVE OU LIBERTÉ D’ÊTRE ? C’est une entrave qui donne une liberté. Personnell­ement, les talons ont été synonymes de mon émancipati­on parisienne. Mais je reconnais qu’il est difficile de marcher longtemps avec. Moi, je ne m’inflige rien, j’essaye d’être douce avec moi-même.

QU’APPORTENT-ILS À LA FÉMINITÉ ? Je trouve qu’ils terminent joliment une silhouette et qu’ils donnent une touche indéfiniss­able, à la fois terribleme­nt féminine et fortement masculine. Du pouvoir, en somme.

QUI SONT VOS PIRES ENNEMIS EN TALONS HAUTS ?

Les rues pavées et les grilles d’aération. J’ai notamment laissé plusieurs paires de talons dans l’immense grille de métro situé devant le Musée des Arts décoratifs, à Paris. Résultat, je rentrais pieds nus.

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À LA HAUTEUR DE SES TALONS ? Non, car les hommes n’ont qu’à bien se tenir. Et puis aujourd’hui, les talons ne sont plus accolés à des clichés tel celui de la femme fatale.

Ils donnent surtout de la hauteur et permettent de s’imposer.

POURRIEZ-VOUS LEUR FAIRE FAUX BOND ? Bien sûr, je me suis récemment cassé la rotule et suis restée à plat pendant six mois. J’ai porté des baskets pour la première fois. En fait, j’étais plutôt bien. J’ai vu le danger. C’est comme le jogging, une fois qu’on a essayé, on y prend goût… Alors dès que j’ai pu, je suis repassée aux talons.

VOS PAIRES FÉTICHES ? Mes Christian Louboutin, bien sûr. Mais j’aime aussi beaucoup les créations d’Amina Muaddi, qui propose quelque chose de différent dans un domaine où tout semble avoir été fait. J’ai aussi une paire de sandales Alaïa avec un Zip à l’arrière qui ne me quitteront jamais. Elles sont d’une élégance folle.

QUE PENSEZ-VOUS DE L’AVÈNEMENT DU PLAT ? Même dans les années 1980, je ne voyais pas beaucoup de talons dans la rue. Je faisais déjà un peu figure d’ovni sur mes stilettos. L’avènement de la basket les a fait nettement chuter également, mais ils reviendron­t, car la mode est un cycle. Et puis, c’est toujours intéressan­t de voir comment se comportent les nouvelles génération­s. Il y a celles qui se revendique­nt ultrafémin­ines et féministes à la fois, celles qui ne veulent plus s’épiler, d’autres qui refusent les diktats de la mode… Chacune s’invente un style, à sa façon, avec ou sans talons.

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