Madame Figaro

OLIVIA RUIZ

“A 17 ans, je chantais dans un groupe de rock- punk”

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« Sur cette image, j’ai 17 ans. Nous sommes en 1997, six ans avant la sortie de mon premier album et je n’imagine pas un instant qu’un jour j’aurai du succès. Tous les soirs, je chantais dans un bar, accompagné­e par Frank Marty, un musicien qui est toujours à mes côtés sur scène. La journée, j’étais technicien­ne de surface (je nettoyais les toilettes et les douches des locaux) et le soir, je montais dans ma Ford Fiesta pour aller faire mes armes et me produire dans ce petit repère au bord de l’eau qui s’appelait Le Bleu, sur la plage de La Franqui, près de Narbonne, où j’ai grandi. Je souris avec tendresse en repensant à ces années. Nous avions formé un groupe de rock-punk qui s’appelait Five, et qui reflétait parfaiteme­nt mon état d’âme de l’époque. J’étais contre tout et terribleme­nt en colère. Pour me décrire, mon père disait souvent : “Olivia est une écorchée vive.” Ce que je découvrais du monde adulte me donnait la nausée. J’avais presque l’âge d’entrer en fac et je réalisais qu’il n’y avait pas assez de places pour tous à l’université. Une grande partie de mes amis, qui y accédaient par mérite, n’arrivait pas à trouver un logement, même avec les APL. On savait que nos parents allaient devoir se sacrifier pour nous et se priver de tout. Cela me rendait dingue. À 17 ans, je découvre donc la culpabilit­é. Je déniche des petits jobs et un appartemen­t, qui est une cage à poule. Le soir, je chante des vers de García Lorca et des reprises de Serge Gainsbourg ou d’Édith Piaf en version punk, avec une voix musclée, frontale, le plus haut et fort possible. Je porte aussi des vêtements qui s’accordent à ce son : perfecto en cuir noir, chaussures à plateforme jaune fluo et des cheveux teints en rose fluo. J’étais terribleme­nt têtue, une désobéissa­nte née, et je savais que personne n’allait pouvoir m’enfermer dans la case étroite que la société avait dessinée pour moi. Aujourd’hui, je me sens en harmonie avec la jeune fille de 17 ans de la photo, en quête d’une pureté sans concession. Elle est toujours en moi, parce que “je suis doué d’une sensibilit­é absurde, ce qui érafle les autres me déchire”, comme l’écrivait Flaubert à George Sand. Elle me regarde parfois avec une certaine désapproba­tion et me traite de “bourge”, parce que j’habite à Montmartre. Mais, on peut être fière l’une de l’autre car je me suis mis un point d’honneur à rester simple, humble, jamais coupée du monde. Et finalement, cette adolescent­e traverse entièremen­t mon nouvel album et se dessine dans la chanson titre, La Réplique : “Je suis de celles qui nagent à contre-courant /

Qui refusent le sens du vent / Celle que personne ne peut attraper / Ni tenter d’emprisonne­r.” »

Nouvel album : « La Réplique », Glory Box Music.

Olivia Ruiz sera en concert à l’Olympia, à Paris, le 20 novembre.

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