Infertilité
Une retraite pour reprendre possession de sa fécondité
Au Pays basque, Charlotte Muller, ancienne avocate reconvertie au fertility yoga, organise des retraites « Healthy hormones », pour donner aux femmes les clés de leur équilibre hormonal. Elle accompagne ainsi celles qui souhaitent tomber enceintes mais aussi toutes celles qui souffrent de règles douloureuses, de syndrome prémenstruel ou d’endométriose.
Au coeur du Pays basque, à Bidart, Charlotte Muller accueille ses « Healthy hormones retreats ». Professeure de fertility yoga, elle propose aux femmes une retraite de quatre jours au bord de l'océan afin de comprendre, préserver et améliorer leur équilibre hormonal. Dès l'entrée dans cette belle bâtisse basque typique, une énergie positive se diffuse. Les participantes sont invitées à se détendre, mais aussi à réfléchir en conscience à leur style de vie, dont la science a prouvé l'impact sur la fécondité. Au programme : fertility yoga, méditation guidée, atelier avec une naturopathe, un « talk » sur la cosmétique sans perturbateurs endocriniens, des repas vegan et du temps libre au bord de la piscine. « Les retraites “Healthy hormones” ne sont pas seulement faites pour pratiquer le fertility yoga dans un cadre différent. C'est une expérience véritablement unique et hors du temps, pour se reconnecter à soi et à la nature cyclique du corps de la femme dans une démarche cognitive et sensorielle », souligne cette prof convaincue et passionnée.
DES POSTURES EN FONCTION DU CYCLE
Première question que l'on se pose : en quoi consiste ce fertility yoga, qui semble être une réponse à de nombreux maux féminins ? Cette discipline a germé dans l'esprit de la docteure américaine Alice Domar, qui enseigne à l'université d'Harvard. La psychologue a établi, grâce à ses recherches, un lien direct entre stress et infertilité. Elle a fini par élaborer un programme de yoga spécifique, adapté aux femmes qui souhaitent tomber enceintes, en combinant des postures de hatha yoga, un régime alimentaire spécifique et des habitudes de vie qui favorisent la conception. D'après ses recherches, en pratiquant le fertility yoga deux fois par semaine, les patientes engagées dans une FIV et atteintes de troubles de la fertilité – cycles irréguliers, insuffisance ovarienne, syndrome d'ovaires polykystiques, endométriose – voient leur chance de grossesse grimper de 32 %. En France, c'est Charlotte Muller qui a démocratisé cette discipline. Elle a découvert les bienfaits de cette pratique en rencontrant elle-même des difficultés pour devenir maman. Après s'être formée aux États-Unis et en Australie, l'ancienne avocate lance
ses cours et ses retraites spécial infertilité. « Dans ce type de yoga, on ne pratique ni torsion ni compression. On mêle des asanas (positions de yoga) dynamiques exclusivement en ouverture de hanches, des exercices de pranayama (respiration sollicitant le bas-ventre) et de la méditation kundalini en première partie de cycle, c'est-à-dire celui de la phase folliculaire », précise-t-elle. C'est en effet une autre particularité du yoga de la fertilité : il se pratique différemment en début et en fin de cycle menstruel. « Entre le J5 et le J14, soit juste avant la période d'ovulation, le cours se veut plus dynamique, pour favoriser la mobilité du bassin. En deuxième partie de cycle, la pratique se veut plus douce et méditative pour favoriser la fécondation ou soulager les douleurs ovariennes », ajoute-t-elle. Ainsi, la session à laquelle nous participons démarre par un tour des participantes qui expriment à quel stade de leur cycle elles en sont. Cette information permet à Charlotte de moduler pour chacune les exercices et la respiration nécessaires. Du sur-mesure !
NO STRESS
À la sortie du cours, le ventre est gonflé. « C'est normal ! », s'amuse Charlotte. Le yoga de la fertilité a pour objectif d'aider à réduire le stress. Cela s'explique par la respiration basse et lente, qui booste la sécrétion de sérotonine par l'intestin et active ainsi le système nerveux, ce qui favorise l'équilibre mental et l'équilibre du système endocrinien. « Séquencer le yoga, en variant son intensité en fonction de la période du cycle, apaise le système nerveux, diminue le niveau de cortisol et participe à une meilleure qualité et quantité ovocytaire », explique Charlotte.
Les postures activent également la circulation sanguine, et ce, jusqu'au bas-ventre et aux ovaires. « Les cours de fertility yoga ne sont pas réservés qu'aux femmes avec un désir de maternité immédiat ou sous traitements d'infertilité. Nombreuses sont celles qui viennent pour réguler des cycles longs ou irréguliers (SOPK) ou réduire leur syndrome prémenstruel et les douleurs d'endométriose », détaille la professeure. Au cours de sa retraite, on pratique ce yoga matin et soir, ainsi qu'une marche silencieuse et méditative le long de la côte basque.
BIEN MANGER ET PRENDRE SOIN DE SOI, AUSSI
Le programme ne s'arrête pas là. Charlotte insiste sur l'approche holistique de la fertilité, qui comprend ainsi une vraie réflexion sur tout notre mode de vie, dont la question du régime alimentaire. Dans son e-book, elle a dédié toute une partie à l'alimentation, rédigée par la naturopathe Alix d'Antras. Cette dernière rappelle que nos hormones se construisent en priorité à partir de nos repas. « Veiller à avoir une assiette équilibrée, riche en nutriments et pauvre en toxiques, est donc essentiel à l'équilibre hormonal, indique-t-elle. Il est ainsi possible de manger en cohérence avec son cycle, en apportant les bons aliments, au bon moment, pour répondre aux bons besoins. » Lors de la retraite, la cheffe et naturopathe Lina Bou, auteure de Healthy & happy food, anime un atelier de cuisine et nous initie aux bonnes pratiques pour notre corps et notre cycle… Elle cuisine aussi tous les plats proposés, dont un délicieux pesto aux fanes de carotte (qui limite
en plus les déchets alimentaires) ! La réflexion va plus loin. Un autre temps fort du séjour est la rencontre avec la fondatrice de la marque de cosmétiques Alaena. Docteure en dermatologie, Sylvie Peres évoque une cosmétologie non reprotoxique, c'est-à-dire non toxique à la reproduction : « Les produits que nous utilisons pour notre corps ont un impact, parfois à long terme, sur notre fonctionnement interne. » La spécialiste a passé beaucoup de temps à essayer de comprendre la problématique des perturbateurs endocriniens. Certains agents trouvés dans la cosmétique classique peuvent pénétrer les cellules et être transmis dans les gènes aux enfants, et certaines molécules peuvent avoir un impact sur la fertilité. « J'ai été bouleversée par des cas de cancers atteignant des enfants d'amis, et cela a été l'élément déclencheur de cette réflexion autour d'une marque de produits clean. Il faut être vigilant et scrupuleux quant au choix de nos soins », insiste-t-elle. Forte des nombreuses études qu'elle a menées ou suivies de près, elle offre un savoir inestimable aux participantes.
LE SECTEUR MÉDICAL À L’ÉCOUTE DE L’APPROCHE HOLISTIQUE
La présence de Sylvie Peres au cours de cette retraite démontre l'intérêt des professionnels de santé pour cette approche plus globale, surtout en ce qui concerne les questions liées à la grossesse. Ainsi, en 2012, Silvia Alvarez, gynécologue obstétricienne spécialisée dans les problèmes d'infertilité, a mené une étude avec le groupe Procreanat sur les conséquences du style de vie sur la fertilité. Plusieurs couples en projet de FIV (348 exactement) se sont prêtés à l'observation et ont pratiqué yoga, acupuncture, alimentation saine, afin d'évaluer les résultats sur la fécondation. À l'arrivée, la professeure Alvarez et ses équipes ont noté une hausse de 30 % des grossesses. « Les pratiques holistiques comme le yoga, l'ayurveda ou l'acupuncture peuvent apaiser les enjeux émotionnels qui se manifestent souvent pendant les consultations liées à l'infertilité, et oeuvrer à l'amélioration de la fécondité », commente la gynécologue.
Si le yoga n'est pas un palliatif aux problèmes médicaux, qui doivent être encadrés par des professionnels de santé, il peut soutenir un suivi médical, en agissant notamment sur le stress. Charlotte Muller collabore désormais avec plusieurs professionnels de santé et des centres de procréation médicalement assistée, notamment à l'AP-HP Béclère à Clamart, la clinique de la Muette à Paris et l'Hôpital Américain à Neuillysur-Seine. Alors qu'en France, près d'un couple sur cinq rencontre des soucis d'infertilité, ces méthodes douces ont de quoi séduire. Elles ne sont pas invasives et semblent obtenir des résultats. « La démarche séduit toujours plus de candidates. S'il n'est pas question d'arrêter les FIV ou le suivi médical, le fertility yoga est un vrai complément à ne pas dénigrer. La plus connue des études sur le sujet est celle d'Harvard Med School, qui a constaté une augmentation de 175 % du taux de succès des FIV avec trois mois de pratique de fertility yoga en amont », souligne Charlotte Muller. Ça vaut bien le coup de tenter quelques asanas, non ? ✪ Pour vous renseigner sur les prochaines sessions : www.charlottemulleryoga.com