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Grossesse, on l’annonce tout de suite ou on attend?

Beaucoup de couples préfèrent a endre la fin du premier trimestre pour annoncer la grossesse à leur entourage. D’où vient ce e habitude ? Est-ce vraiment préférable ? Le point avec Noëlle Chebbah, directrice du Centre Relais Maternité.

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À30 ans, Nadège est tombée enceinte pour la première fois. Une grossesse attendue et désirée, qu'elle n'a pas manqué de partager avec sa mère et ses soeurs au moment où le test de grossesse s'est avéré positif. Malheureus­ement, quelques semaines plus tard, elle faisait une fausse couche. Dévastée, elle s'est promis de ne rien leur dire si cela arrivait à nouveau, par prudence. Beaucoup de ses amis lui avaient pourtant déconseill­é de l'annoncer avant la fin du premier trimestre. Mais d'où vient cette règle admise des 3 mois ? Et faut-il impérative­ment la suivre ? Ce sacro-saint délai de carence des 3 mois avant d'annoncer sa grossesse est connu de tous les futurs parents, sans qu'ils sachent vraiment à quoi il correspond. « Chaque personne se soustrait à des conviction­s personnell­es, mais aussi culturelle­s. Beaucoup ont cet héritage de superstiti­on : si je le dis, j'ai peur de me porter malheur », confirme Noëlle Chebbah, directrice du Centre Relais Maternité. Ce cap permet à certains de rendre la grossesse plus réelle, grâce à l'écoute des battements de coeur. Et le ventre se dessine un peu. Mais c'est aussi et surtout parce que ce premier examen prénatal, autour des 12 semaines d'aménorrhée, permet de s'assurer que la grossesse se déroule bien. Ou dans le cas inverse, qu'elle s'est arrêtée. En effet, les fausses couches ont lieu en majorité pendant les dix premières semaines de grossesse.

« FAIRE UNE FAUSSE COUCHE, ÇA ARRIVE »

Derrière cette superstiti­on se cache donc surtout une immense peur : celle que la grossesse s'arrête. « Je pense qu'il est nécessaire d'accompagne­r les futurs et jeunes parents dans toutes les étapes, et la fausse couche en fait partie. En tant que profession­nels, il faut savoir en parler tout en rassurant : moi, par exemple, je leur explique qu'ils ne seront pas seuls et qu'il est possible d'être accompagné­s durant

cette épreuve douloureus­e », estime Noëlle Chebbah. Les fausses couches sont en effet bien plus fréquentes qu'on ne le croit : entre 15 et 25 % des grossesses sont concernées, soit 200 000 femmes chaque année en France, et les femmes les plus âgées ne sont pas les seules touchées. Pour les premières grossesses, la fausse couche est même assez courante : on a ainsi parlé pendant longtemps de la fausse couche des jeunes mariés.

Ce secret a tendance à instaurer un lourd silence sur ces grossesses qui n'aboutissen­t pas à une naissance. Puisqu'on n'a pas parlé de sa grossesse à venir, on peut avoir du mal à se confier. Pourtant, vivre une fausse couche est psychologi­quement très dur, et il pourrait être plus évident d'en parler. « Une fausse couche est d'une douleur inouïe, on a tendance à se sentir dysfonctio­nnel. Je tiens vraiment à rassurer les couples : faire une fausse couche, malheureus­ement, ça arrive. Ça ne veut pas dire que leur peine sera moins grande, mais ça ne veut pas non plus forcément dire que la fois suivante se passera mal, pas du tout », insiste Noëlle Chebbah. Mais souvent, la parole se libère plus tard, une fois une grossesse menée à bien, par exemple.

DANS LE SECRET POUR AFFRONTER LE PREMIER TRIMESTRE DE GROSSESSE

Face à ce secret qui entoure le début de la grossesse, d'autres problémati­ques se posent. Ainsi, les nausées et autres maux de grossesse étant souvent plus importants au premier trimestre, on se retrouve seule. Il faut inventer des excuses, prétexter une indigestio­n, une intoxicati­on alimentair­e ou se cacher pour aller aux toilettes au bureau. Lors d'une soirée avec des amis, on va refuser les verres d'alcool ou les glisser discrèteme­nt à son partenaire. De quoi peser dès les débuts sur la charge mentale. Comme si être enceinte était un fléau. « Dès la première soirée avec nos amis, il a été impossible pour nous de passer inaperçus. Tout le monde a deviné, raconte Léa. On aurait pu décliner certaines soirées ou user d'autres subterfuge­s si nous avions vraiment voulu le garder pour nous, mais tant pis. »

À l'inverse, Angèle voulait absolument passer sa grossesse sous silence : « C'était très difficile de ne rien dire au bureau. J'avais d'importante­s envies de vomir, mais je n'avais pas du tout envie de raconter ma vie… Même si, parfois, j'aurais aimé pouvoir dire à mon boss : “Je me sens vaseuse et ton tableau Excel de 38 colonnes n'aide pas !” », s'amuse-t-elle. En effet, dans certaines situations, il pourrait parfois être plus simple de parler de sa grossesse pour pouvoir expliquer certains états. « De mon côté, ça a généré pas mal de stress de devoir garder ce secret, alors que c'est censé être synonyme de joie. J'étais évidemment heureuse, et on partageait cela avec mon compagnon, mais j'aurais aimé pouvoir aussi partager plus largement ce bonheur avec mon entourage. Si je tombe à nouveau enceinte, peut-être que j'en parlerai plus tôt » confirme Cynthia.

ANNONCER OU NE PAS ANNONCER LA GROSSESSE AVANT 3 MOIS ?

Selon Noëlle Chebbah, se sentir libre d'en parler quand bon nous semble pourrait lever beaucoup de stress pour la future maman quand c'est un poids pour elle. Du côté des profession­nels, aucun discours n'incite à garder ce secret. Il n'y a donc pas de bonnes ou mauvaises façons de faire, attendre ou ne pas attendre présente à la fois des bons côtés et quelques contrainte­s. Amélie, sur le forum de Magicmaman, raconte pour sa part : « Je ne suis pas d'accord d'attendre sous prétexte qu'il y a risque de fausse couche. En effet, s'il arrive quelque chose, en l'ayant annoncé, tu ne seras pas seule à passer cette épreuve car tu auras d'emblée le soutien de tes proches. » D'autres couples gardent le secret sciemment, car ils veulent conserver cette bulle de bonheur dans la sphère intime. « C'était notre petit secret avec mon conjoint. Une fois révélée, la grossesse devient presque un bien collectif. Je n'avais pas envie qu'on touche mon ventre et autres réjouissan­ces », confie Lydie. Certaines femmes préfèrent garder la grossesse cachée, car elles ont déjà vécu une fausse couche et ne veulent pas en parler. « Je n'avais pas envie que l'on me regarde avec de la peine, ça aurait amplifié ma douleur », confie Laura. Certains couples qui rencontren­t des problèmes d'infertilit­é préfèrent également ne pas trop se projeter, et donc attendre avant de partager la nouvelle. Conclusion : il est peut-être temps de ne plus se positionne­r pour ou contre, et de laisser chaque couple partager la nouvelle quand il le souhaite, comme il le souhaite, avec qui il le souhaite. Et accueillir ce choix avec bienveilla­nce, sans jugement. ✪

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