Hautes-Alpes
Au Pays de Serre-Ponçon, tous les points de vue convergent vers le joyau turquoise. Mais la vallée de l’Embrunais, entre eaux et alpages, offre également mille richesses, dont la dernière, la Maison Cimes, nous ouvre ses portes.
Autour du diamant bleu. La vallée de l’Embrunais ou le bonheur d’un été entre eaux et alpages.
C’est notre petite mer intérieure, explique le chef Sébastien Félix du restaurant La Table de Sébastien. L’été, aux Orres, on peut choisir tous les jours entre la randonnée, le VTT et la baignade en bas, c’est magique!» De partout dans la montagne, on aperçoit cette immense étendue lapis-lazuli, le second plus grand lac artificiel d’Europe, dont le barrage fut créé en 1955, pour maîtriser la fougueuse Durance. Qui aurait cru alors que ses flots, où se mire le Grand Morgon, se prêteraient à toutes les activités nautiques, favorisées l’après-midi par la montée des vents thermiques? Dans la vallée, le sport n’est pas une anecdote. À la station des Orres, imaginée en mimétisme avec les mélèzes et la neige, et labellisée Patrimoine du XXe siècle, on emprunte en vélo une trentaine de kilomètres de pistes balisées, sans oublier les randonnées au milieu des pins cembro, les via ferrata ou l’équitation. La reine du tourisme équestre, c’est Evelyn Joachim, qui, du ranch Le Kiowah, vous emmène découvrir la faune et la flore. Une cueillette qui se transforme en cours d’aromathérapie où l’on découvre comment transformer les pissenlits en tisane ou en salade, les vertus thérapeutiques ou beauté des primevères, du millepertuis et du calendula. La belle variété de la flore alpestre inspire également les chefs locaux. À La Table de Sébastien, pensée, bleuet et hysope parfument les plats. Le chef très locavore utilise beaucoup les plantes qui apportent « fraîcheur, acidité et texture en bouche». Même
philosophie chez Xavier Lecharny à la Maison Cimes dont la cuisine explore les baies de genièvre comme la saveur du mélèze. Une inspiration que l’on retrouve chez le maître chocolatier d’Embrun, Luc Eyriey, qui sculpte des saynètes en chocolat saisissantes de vérité racontant la mode ou les courants artistiques à travers l’histoire mais n’en n’oublie pas les ganaches au thym ou au thé! Aux Crots, le château de Picomtal, qui abrite des chambres d’hôtes, a reçu en 2015 le prix VMF Jardin contemporain et Patrimoine, pour son parc ressuscité, qui est l’oeuvre d’un enfant du pays, le paysagiste Loïc Pianfetti. Dominé par les cimes méridionales du massif des Écrins et du Parpaillon, le château du XVIe siècle dialogue magnifiquement avec les plantes rustiques et aquatiques. Dans la vallée de l’Embrunais, la nature est un enjeu majeur, sanctuarisée depuis 1973 par la création du Parc national des Écrins qui protège près de 92000 hectares de montagne. Un bol d’air et de biodiversité qui croise parfois la grande histoire et l’art. La ville d’Embrun porte les traces de sa grandeur passée, ancienne capitale romaine et métropole ecclésiastique, avec la cathédrale Notre-Dame du Réal qui domine la vallée du haut de son roc et ses fortifications Vauban. Marie-Christine Lapassat est fière de montrer que sa ravissante maison de maître, la chambre d’hôtes Le Pigeonnier, existait déjà sur les plus anciens plans de la ville. L’abbaye de Boscodon, chef-d’oeuvre de l’art roman, fondée au XIIe siècle par l’ordre de Chalais, se niche, dans une luxuriante sapinière, au pied du Grand Morgon et accueille des expositions. À une
demi-heure du lac, on retrouve la jolie préfecture des Hautes-Alpes, Gap, et l’incontournable Musée Muséum départemental où la conservatrice Frédérique Verlinden crée des passerelles inédites entre les collections permanentes et l’art contemporain, en interrogeant l’identité rurale. Mais lorsqu’on a évoqué la nature nourricière et le patrimoine superbe de l’Embrunais, on doit parler de sa toute dernière perle, aussi belle qu’hospitalière, la Maison Cimes. Dans le ravissant village du cheflieu des Orres, un ancien gîte d’étape a laissé place à la plus contemporaine des chambres d’hôtes, de lin et de bois vêtue, dans des tonalités chanvre, bleu pétrole et jaune tournesol. Après des expériences à Eygliers et Nantes, Sandrine et Xavier Lecharny ont souhaité revenir dans cette nature incomparable, qui conjugue montagne et soleil. « Ici on ne respire pas pareil, explique Sandrine. La ville est trop bouillonnante pour nous. Cette maison, où plusieurs générations se sont succédé, a une vraie histoire et nous, on aime rencontrer des gens, partager, faire plaisir.» Outre les suites dotées de ravissantes terrasses, la salle à manger est une merveille de simplicité avec ses lustres d’osier, ses petits bouquets champêtres, ses tables sobrement apprêtées. Une épure scandinave qui résonne avec la belle nature environnante, des arbres centenaires du jardin à la vue époustouflante sur la vallée, en panoramique. Les arts gastronomiques sont à l’unisson : «endive, champignons et réglisse», «asperge, burrata et baies de genièvre ». Une musique classique emplit la maison tandis que l’on s’attarde sur la belle collection de livres d’art et les dessins, au mur, de leur fils déjà très prometteur. Les Cimes sont vraiment le sommet de notre voyage !