Cuvée Klapisch
Loin de Paris ou de Barcelone, Cédric Klapisch met en scène, dans « Ce qui nous lie», sorti le 14 juin, le vignoble bourguignon. À l’affiche aussi, «Nature humaine»,une expo photo qui plante le décor. Sous-titres, in situ.
Beau millésime pour la Côte-d’Or que cette année 2017 ! Alors que le département célèbre les quatre-vingts ans de la Route des Grands Crus, le dernier film de Cédric Klapisch cadre ce vignoble d’exception, aux mains d’artisans depuis des générations: un travelling qui vaut toutes les cartes postales. Pour les secrets de repérage et de tournage, direction le magnifique Clos de Vougeot et son grand cellier, où le réalisateur croise son regard avec celui de la photographe de plateau, Emmanuelle Jacobson-Roques, et d’un éclairé du cru, Michel Baudouin: jusqu’au 14 juillet, le terroir se confirme une oeuvre d’art. On pourrait croire à une conjonction promotionnelle des astres, mais non. « J’ai eu envie de faire un film sur le vin dès 2010, confie l’amateur de bourgogne, initié par son père. Avec lui, j’ai multiplié les dégustations chez les producteurs, mais je n’avais jamais assisté à des vendanges.» Un bonheur n’arrivant jamais seul, c’est Jean-Marc Roulot qui lève ce rideau. Viticulteur en appellation Meursault, dont le premier cru Perrières
fait flamber les enchères, le Beaunois est par ailleurs un comédien patenté, formé au Conservatoire d’art dramatique de Paris : de quoi décrocher un rôle de choix – et transformer un essai aux débuts de Cédric Klapisch ! Tout est question de temps. « Auparavant, j’ai voulu observer les changements de paysages, au passage des saisons, se remémore le réalisateur. Pendant six mois, j’ai fait des allers et retours sur place, à la recherche d’un arbre qui raconte ce cycle naturel et le travail de l’homme, hors champ dans l’expo...» Au lieu d’enraciner sa caméra, il se retrouve à New York pour Casse-tête chinois, puis accaparé par d’autres aléas, favorables in fine. « J’ai tourné en 2015, seule année sans accident de météo ! » Dans cette saga familiale pleine terre, celle-ci s’invite évidemment au casting, aux côtés de Pio Marmaï, François Civil et Ana Girardot. Soit trois jeunes adultes frères et soeur, qui héritent du domaine familial. Droits de succession, taille des vignes, récolte du raisin, Paulée et autres rituels locaux de cette microsociété... « Pour moi, le vin est associé à une idée de transmission. Morcelée, la Bourgogne s’est d’autant plus imposée que les exploitations y sont, en général, familiales et artisanales. Combinaison de la géographie d’une parcelle, de la géologie d’un sol, de conditions d’ensoleillement et de pluviométrie, le tout interprété par un vigneron, le vin s’apparente ici à un travail d’auteur: quand un vigneron signe une bouteille, c’est comme quand un réalisateur signe un film.» Hors projection, une application téléchargeable permet de se le rejouer sur cette haute-côte de Beaune, de clos en caves, du printemps à l’hiver. « Avec ses lumières monochromes entre bleu et violet, quasi tristes, c’est peut-être mon moment préféré », commente ce père quinquagénaire, qui s’est épris de nature après onze films urbains. « Question d’âge, miroir sociologique ? Est-ce ce que les étapes de la vie peuvent être comparables aux saisons, pour la nature ? » Reste à faire bonifier cet éternel recommencement, à l’instar de ces « climats » inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2015, chéris depuis plus de deux mille ans par des hommes... et des femmes aujourd’hui. Clap ! closdevougeot.fr, route-des-grands-crus-de-bourgogne.fr et cotedor-tourisme.com