CONCEPT EN BÉTON
Sous ses atours historiques, entre brique cuite, frise en grès de Berne et lambrequin vieux rose, la maison familiale d’Andreas Bründler cache bien son jeu contemporain. Pour rénover cette remise à calèches, l’architecte a inséré entre ses ailes de service une structure en béton, fil décoratif à tous les étages. Aussi brute que raffinée, cette spatialité gigogne est lumineuse.
Cofondateur de l’agence Buchner Bründler Architekten en 1997, l’heureux propriétaire peut s’avouer fort de son expérience. Grappe de réalisations circulaires pénétrées par un télésiège, le Pavillon suisse de l’Exposition universelle à Shanghai en 2010 alliait harmonieusement nature et technique, créant un ensemble hybride qui équilibrait ville et campagne : bien que proche de la porte de Spalen, au coeur de l’agitation bâloise, sa nouvelle maison familiale est une oasis à l’abri de grands arbres. Qu’ils rénovent une maison villageoise du Tessin ou construisent un immeuble d’habitation sur leur territoire, les associés bâlois ont fini lauréats du Prix d’architecture Béton 13 : ce matériau a gardé la prédilection d’Andreas pour restructurer, de fond en comble, l’ancienne remise à calèches où il a pris ses quartiers au printemps dernier, avec sa femme et ses deux enfants. Autre réalisation dans la ville suisse, le réaménagement de la Sevogelstrasse a revisité ses vieilles pierres patrimoniales à la faveur d’un vocabulaire de l’architecture moderne : coup de coeur du couple, le pignon et ses volutes boisées ont non seulement motivé l’achat de ce bâtiment datant du XIXe siècle, mais aussi inspiré le motif circulaire qui jalonne la décoration intérieure. «Cette géométrie harmonieuse, qui casse avec l’orthogonalité, nous a permis de faire un lien entre l’existant et le nouveau », explique l’expert au sujet de son acquisition en 2018. Équipée d’une écurie, d’un grenier à foin et d’une pièce de service incluant une sellerie, l’abri à calèches nécessitait de relever une autre gageure. Comment faire pénétrer la lumière du jour, alors que des murs coupe-feu aveuglent l’édifice au sud-est et au sud-ouest? Décollée de cette structure fondatrice, l’imbrication de béton vient se poser en atrium, sur un air de lévitation qui accentue « la complexité spatiale ». Artifices naturels croisés verticalement et latéralement via les fenêtres pivotantes et les découpes courbes, les rayons du soleil déploient une interaction joyeuse dans toutes les pièces, où qu’elles soient situées. Ouvert sur la cour-jardin, dont la pelouse fait place à un bassin volontiers balnéaire l’été, le rez-de-chaussée immerge dans une fluidité d’un seul tenant ; autour d’une cheminée et d’un comptoir moulés sur place, du mobilier fait graviter salon, salle à manger, cuisine et, dissimulés à l’oeil, un coin dressing et bibliothèque. Dévolu aux enfants et aux invités, le premier étage se partage à nouveau éléments intégrés en béton et pièces mobiles, dont certaines conçues par Andreas et Sandra Bründler. Puis l’escalier mène à l’espace parental d’esprit mezzanine, qui répète l’effet terrazzo sur le sol en béton sablé. D’un oeil de boeuf géant à un Velux plein toit, c’est une autre ronde jusqu’au septième ciel.