CHANTIER DOMESTIQUÉ
La maison familiale de l’ingénieur Joris Van Apers, beau prétexte à des expérimentations libres.
En association avec sa compagne, Caroline De Wolf, l’ingénieur Joris Van Apers s’est recyclé en diversifiant l’entreprise paternelle, gisement de matériaux de récupération. Menuiserie, taille de pierre, pose de cheminées ou ornementation de jardin, leur maison familiale est un beau prétexte à des expérimentations libres, telles des herbes folles dans la campagne anversoise.
Rien ne se perd, tout se recycle, même une construction maison. « Joris et moi dirigeons l’entreprise et nous avons conçu notre villa comme un laboratoire : sur le terrain, cette rénovation nous a permis d’expérimenter des influences rencontrées pendant nos voyages, de concrétiser des idées évoquées avec des clients ou encore de tester des matériaux qui nous intriguent », campe Caroline De Wolf, qui a lâché sa blouse de médecin pour s’associer à la reconversion de son mari. Aujourd’hui florissante, étayée par une équipe de menuisiers, tailleurs de pierre, architectes d’intérieur et chefs de chantier, l’aventure s’est amorcée en 2000. Alors qu’il supervisait l’implantation d’usines à travers le monde, Joris Van Apers a eu l’envie d’un chantier à sa mesure familiale, mettant en oeuvre des goûts plus personnels. Il invente une habitation pour sa compagne et leurs deux filles, voisinant avec ses parents à Duffel. Avec son stock de vieilles poutres et autres éléments constructifs de récupération, l’entreprise paternelle lui fournit de quoi architecturer cette figure libre, inspirée par Frank Lloyd Wright. Fort de cette expérience sur 400 mètres carrés, sans compter un bassin de nage et une pool house bucolique, il décide de se bâtir une nouvelle carrière par atavisme. Non content de reprendre le filon, qui fournit d’éminents décorateurs tels Jacques Garcia ou Axel Vervoordt et qu’il met en vitrine dans un showroom tout proche à Reet, le fils prodige développe une activité de conseil, jusqu’à s’établir en prénom propre en 2008. En 2016, sa création originelle le lasse. « Emblématique des années 1990, à grand renfort d’Inox et autres surfaces froides, l’intérieur manquait de charme », sourit l’ingénieux touche-à-tout. D’où un remueménage méthodique, achevé il y a un an. Pendant que la rénovation transfigure même la façade, les volumes sont redistribués autour d’un monumental escalier, adouci par son stuc de plâtre. L’illustre architecte américain y étage encore son aura puisque ce pilier convoque le musée Guggenheim de New York, qu’il a signé en 1959. «À l’image d’un arbre qui se ramifie, ses hautes courbes distribuent l’entresol, où se regroupent les pièces de vie, jusqu’au dernier niveau, qui nous est consacré. Entre les deux, il dessert les chambres de nos adolescentes, également accessibles par une passerelle qui dynamise une profondeur », détaille Joris. Ces idées folles se rehaussent d’un patchwork de textures habitées, où s’invitent meubles vintage d’anonymes et oeuvres contemporaines pour initiés. À la clef, conclut Caroline, « une ambiance aérienne, chaleureuse, sensuelle, informelle, polychrome, ludique. » Un jeu de grands, indoor et outdoor.
PAGE DE GAUCHE Avec leur talent pour magnifier les matériaux de récupération, les propriétaires privilégient le mobilier vintage de ventes publiques et de brocantes, telles ces chaises en laiton et cuir chinées dans la Kloosterstraat à Anvers.
PAGE DE DROITE 1. En noyer, le vaisselier harmonise son épure sur mesure avec la cheminée Cosy Flame. 2. Agencée par l’entreprise du duo, la cuisine intègre une cuisinière La Cornue entre boiseries brutes et ardoise noire. L’îlot rehausse ce camaïeu avec les carreaux de la céramiste française Regula Brotbek et des robinets St James. 3. Colimaçon monumental, l’escalier met ce patchwork en lévitation.