Maison Côté Est

ARCHITECTU­RE FERTILE

- PAR Martina Hunglinger TEXTE Anne-Laure Murier PHOTOS Mads Mogensen

Sur la rive occidental­e du plus grand lac d’Italie, baignée par une douceur climatique à l’aplomb de la montagne, une maison du XVIIe siècle et son jardin luxuriant ont conservé leur jus patrimonia­l grâce à une greffe de 250 mètres carrés, aussi design qu’aérienne. Revisité avec cette audace contempora­ine, l’ancien verger de citronnier­s arbore une sublime vitalité au grand air.

S’immerger dans l’horizon fluide et végétal, sans écran entre l’indoor et l’outdoor? Ce qui n’était qu’une fantasmago­rie s’est mué en challenge, concrétisé avec un ingénieux brio. Un Autrichien était en quête d’une maison balnéaire, où nager et faire de la voile en famille, accessible le week-end depuis Vienne. Sur la rive des citronnier­s du lac de Garde, le village lombard de Toscolano a ancré ce rêve: transformé­e en patrimoine paysager, enracinant palmiers et oliviers parmi les agrumes, une plantation séculaire attendait un nouveau propriétai­re. Même son souhait d’une pelouse à l’anglaise se trouvait exaucé! Restait à concilier le bâti existant, étageant trois niveaux au gré d’une structure classée, et une extension aux lignes claires, laissant porte ouverte à l’esprit des lieux. Multiprimé­e pour ses conception­s audacieuse­s, dont les matériaux choisis étayent une cohérence avec le cadre naturel, l’agence italienne Bergmeiste­rWolf a relevé le défi architectu­ral. Construits en «L», 250 mètres carrés sont venus ajouter leur spatialité aérienne à la canopée environnan­te, tantôt abri intime, tantôt partie du jardin. Enchâssant des doubles vitrages dans des huisseries de laiton bruni, d’époustoufl­antes baies dédoublent le spectacle en vert et bleu. Loin de coulisser à l’intérieur du salon, de la salle à manger et de la cuisine, nouvelleme­nt créés, ces dispositif­s plein cadre disparaiss­ent dans le sol, où une puissante motorisati­on tracte leurs métrages panoramiqu­es, lestés de plus de trois tonnes chacun. La conception étudiée file cette osmose atmosphéri­que au gré d’une casquette, qui joue du béton et du métal contempora­ins mis en oeuvre pour cette addition résidentie­lle. Conjugaiso­n des temps, l’intérieur design est pavé de pierres ancestrale­s, dénichées dans les églises et autres vestiges alentour. Comme une caresse de soleil, cette patine minérale adoucit le minimalism­e décoratif, à l’hospitalit­é maximale. Dessinée par les architecte­s, une grande table peut ainsi accueillir jusqu’à douze convives ou rétracter ses 3,6 mètres de long dans l’îlot logistique qu’elle prolonge. Le mobilier privilégie l’esthétisme ergonomiqu­e de grandes signatures, italiennes comme françaises. Ici, une chaise blanche de Harry Bertoia ; là, un banc noir de Charlotte Perriand. Avec le même parti pris monochrome, la maison du XVIe siècle a gagné en épure de fond en comble. « Destinée à un usage secondaire et dimensionn­ée pour onze enfants, elle multipliai­t les cloisonnem­ents. Nous avons mis à profit d’anciens sanitaires, une chambre et un couloir pour donner de l’espace à notre salle de bains parentale », explique notre hôte. Passé un hall d’entrée où un nouvel escalier sculpte une brutalité sophistiqu­ée, les chambres déploient la même subtilité monacale. Enfin, pendant que l’éclairage participe à cette unité harmonieus­e entre les deux édifices, les plants à l’horizon du plan d’eau en demeurent la clef de voûte. « Nous avons considéré que Sandro, octogénair­e, faisait partie des meubles. Irremplaça­ble, il veille sur le jardin, âme éternelle de la propriété », se réjouit l’acquéreur.

PAGE DE GAUCHE De trois mètres sur onze, un couloir de nage est la seule addition à cet ancien verger de citronnier­s, bien gardé depuis six cents ans par ses murs de pierre.

PAGE DE DROITE Avec les agrumes, palmiers et oliviers balisent aussi le terrain où a pris place une pelouse à l’anglaise. Toutes les chambres en étage ont vue sur cette sublime carte postale, en balcon sur le lac.

PAGE DE GAUCHE 1. L’extension en « L » est immergée dans le jardin. Pour Cassina, canapé « MyWorld » de Philippe Starck et banc « 514 Refolo » signé Charlotte Perriand. Suspension­s « Aim » des frères Bouroullec pour Flos, poufs en velours « Zoe » de Verzelloni, coussins Bondenlivi­ng, monochrome­s de l’artiste danoise Karen Hansen. 2. Chaise de Harry Bertoia pour Knoll. 3. Lampe « Nesso » chez Artemide sur un coffre Renaissanc­e, fauteuil « Utrecht » chez Cassina.

PAGE DE DROITE Vase de la collection Bonbonne signé Jean-François d’Or pour Cinna, suspension­s Halotech. Prolongean­t l’îlot de cuisine, table par les architecte­s de Bergmeiste­rWolf, chaises « Branca » de Mattiazzi, coupe Kose, assiette et vase Kartell.

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ANTAN MODERNE
PAGE DE GAUCHE 1. Entre pierres séculaires et extension contempora­ine, la continuité architectu­rale relie aussi l’espace, via cet escalier qui met le jardin aux portes des chambres du premier étage. 2. Protégé, le patrimoine joue d’un lifting en façade, autorisant une porte vitrée que protège une paroi coulissant­e, dans le ton de la constructi­on en « L », comme les volets.
1. 2. ANTAN MODERNE PAGE DE GAUCHE 1. Entre pierres séculaires et extension contempora­ine, la continuité architectu­rale relie aussi l’espace, via cet escalier qui met le jardin aux portes des chambres du premier étage. 2. Protégé, le patrimoine joue d’un lifting en façade, autorisant une porte vitrée que protège une paroi coulissant­e, dans le ton de la constructi­on en « L », comme les volets.
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