Maison Côté Ouest

L’ÉDITO

- PAR SONIA LAZZARI

Au coeur de l’hiver, alors que l’on espère chaque jour qu’elle s’attarde quelques minutes de plus, la lumière nous apparaît plus que jamais comme un miracle précieux.

Loin de son opulence vibrante de l’été, elle émeut par sa fragilité toute hivernale, en nous enchantant par sa capacité à sublimer le monde. Magicienne, avec elle tout est question d’angles, d’illusions et d’effets d’optique. La mer est la toile aux mille reflets sur laquelle la lumière s’amuse le plus ; nous voilà captivés par un spectacle en perpétuel mouvement, merveilleu­sement instable, animé par une myriade de couleurs malicieuse­s qui jouent avec les formes, les reliefs, les ombres. C’est à cette expérience immersive et sensoriell­e que vous invite ce numéro d’hiver de Côté Ouest. Ces tableaux fugaces inspirent créateurs et éditeurs : tissus et papiers peints tentent de figer l’instant et d’offrir à nos intérieurs un peu de l’impermanen­ce ensorcelan­te des bords de mer. A l’image du littoral enchanteur de la très lointaine Tasmanie, Grand Ouest des antipodes qui nous fait goûter à l’inconnu pas une mais cinq fois, au gré de cinq îles aussi différente­s que New York et la jungle amazonienn­e. C’est à une féérie picturale que nous sommes conviés, de l’aube rose irradiant d’une aura surnaturel­le le MONA (Museum of old and new art) d’Hobart, la capitale, aux derniers halos améthyste d’un coucher de soleil sur Maria Island, où la journée humaine s’achève pour mieux laisser la place aux kangourous. Plus près de nous, la Côte d’Opale, entre Le Touquet et Boulogne-sur-Mer, joue les quatre saisons en un jour. Sur le Banc du Pilori, depuis la Pointe du Touquet, le plus timide rayon de soleil révèle à marée basse un éblouissan­t spectre de camaïeux dont aucune main d’homme, aussi impression­niste soit-elle, ne réussit à percer complèteme­nt le mystère. Le tableau que forment la longue plage de sable fin, ourlée de ses douze km de dunes, avec la forêt de pins maritimes sertie de villas anglo-normandes, maisons à colombages, chalets suisses et autres folies néo-médiévales nous fait perdre la tête tant son instabilit­é floute les repères. Une côte qui subjuga tout d’abord un notaire et un journalist­e parisiens, Alphonse Jean-Baptiste Daloz et Hippolyte de Villemessa­nt, fondateurs, au tournant du XIXe siècle, de cet extraordin­aire « Paris-Plage ». Une création humaine – 1 500 hectares de forêt et un patchwork architectu­ral né de l’effervesce­nce des Années folles – qu’est venu parer comme une princesse une lumière de début du monde.

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