DOUBLE MALT
Au coeur des Highlands, l’architecte Susie Whyte revisite le manoir victorien grâce à un design épuré et une simplicité assumée.
Dans l’Est du pays, la vallée du Tay est une région de plages splendides et de vallons pittoresques. C’est au coeur de cette nature paisible, à Aberfeldy, que l’architecte Susie Whyte a transformé un manoir à l’allure austère en une maison d’hôtes accueillante, ponctuée de grandes fenêtres ouvertes sur un environnement préservé. Un dosage parfait de tradition et d’esthétique minimaliste.
Au coeur des Highlands, dans la vallée du Tay, la maison de l’architecte Susie Whyte semble avoir toujours fait partie du paysage. Son allure classique, sobre voire sévère, est de bon ton dans cette région traditionnelle que demeure l’Écosse. Une fois la porte d’entrée franchie, c’est une autre histoire : ne cherchez pas de rideaux aux motifs tartans, de canapés en velours vert bouteille, de trophées de chasse ou d’armoiries au-dessus de la cheminée, vous ne trouverez qu’un design épuré et une décoration qui va à l’essentiel. Mieux encore : à Dun Aluinn, il n’y a tout simplement pas de rideaux ! La maîtresse des lieux a voulu « amener le paysage à l’intérieur sans que le bâtiment ne lui fasse concurrence » . Mission réussie. La vue sur la vallée, cernée par les montagnes prises dans la brume, offre une beauté paisible qui justifie une rupture nette avec les codes de décoration « chaleureuse » que l’on s’attend à découvrir ici. Au-delà de la vue spectaculaire, il fallait tout de même une vision. Quand Susie et son mari, John Burke, ont acquis la propriété, celle-ci ressemblait « au gâteau d’anniversaire d’une fillette de 6 ans » . Dans la lignée des codes décoratifs de la fin de l’époque victorienne, corniches et pignons apparents étaient de couleur rose bonbon et le confort s’avérait assez sommaire, excepté un système de chauffage revu et des fenêtres isolantes. Les propriétaires souhaitaient préserver l’esprit « maison hantée » des lieux tout en remettant au jour les éléments architecturaux dissimulés par les couches successives de décoration. Ils ont travaillé de concert pour modifier l’intérieur : il a fallu toute la détermination de John pour transporter le buffet-bar Art déco italien de Barcelone à Dun Aluinn ; mais c’est Susie qui a insisté pour dessiner et faire fabriquer la table, pièce maîtresse de la salle à manger. Véritable oeuvre d’art de 5,5 mètres de long, façonnée en bronze et chêne, elle apparaît comme un symbole de l’art de vivre, de recevoir et de célébrer cher aux propriétaires. Son design entre en résonance avec le fil rouge que s’est donné sa conceptrice, « une simplicité assumée, des matériaux nobles, de l’artisanat expert, sans la moindre exagération » . Intégrer la modernité et le confort du XXIe siècle dans une maison d’époque de quelque 600 mètres carrés requérait évidemment précision et réflexion mais aussi l’art de repousser, parfois, les limites du possible. Particulièrement difficiles à travailler, les salles de bains et la cuisine ont été aussi, selon le couple, les plus gratifiantes. Le fait d’avoir associé des artisans aux différents corps de métier pour la plomberie, la mise aux normes et la récupération des sols d’origine y fut pour beaucoup. « Il a souvent été nécessaire de convaincre les équipes que boiseries et parquets d’origine valaient le coup d’être sauvés et restaurés, même si cela faisait sortir du budget et impliquait des imperfections. » Le résultat est un équilibre entre deux époques, un cachet historique qui nous donne l’impression d’être hors du temps, un confort et une esthétique minimaliste portés par une vraie, belle, convivialité.