Maison Côté Sud

BONS BAISERS DE ZORRO

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Au commenceme­nt étaient les prairies de

lupins sauvages et de pavots de Californie orange vif, dont on peut encore admirer des spécimens au jardin botanique du Mission Canyon. C’est non loin de là, à bonne distance d’un océan où personne ne songeait encore à surfer, que les pères franciscai­ns bâtirent, en 1786, l’une des perles du chapelet de missions qu’ils égrainèren­t entre San Diego et San Francisco. Le Presidio, dernier avant-poste de la Couronne d’espagne dans le Nouveau Monde, veillait au grain et c’est ainsi, entre pouvoir militaire et religieux, que Santa Barbara fit son entrée dans l’union, en 1850. À l’époque de la ruée vers l’or, le petit pueblo aux maisons d’adobe grandit vite, adopte les codes de sa nouvelle nation : rues en échiquier et maisons victorienn­es en bois, qu’un violent tremblemen­t de terre, en 1925, s’empressa de mettre à bas. Une poignée d’architecte­s et de citoyens passionnés profitèren­t de l’occasion pour remettre en vogue l’architectu­re hispanique des origines. Murs chaulés de blanc, toits de tuiles rousses, décors en fer forgé et céramique colorée, les constructi­ons de style Spanish Colonial Revival ouvrent généraleme­nt sur un patio, des fontaines, cherchent à ressembler « à une rue d’espagne », mais vue d’amérique. C’est vrai, par exemple, du centre commercial El Paseo, construit en 1922, dont les arcades historique­s abritent des boutiques de charme et certaines wine

ries de l’urban Wine Trail. Mais aussi de l’opulent County Courthouse, de 1929, plus hacienda que tribunal, où l’on s’attend à croiser, d’un instant à l’autre, Diego de la Vega ou le sergent Garcia. Car c’est bien à Santa Barbara que l’écrivain Johnston Mcculley imagina dès 1919 son personnage de Zorro, que Douglas Fairbanks, puis Guy Williams pour Disney, incarneron­t à l’écran et feront entrer dans la légende. Petit à petit, les codes hispanique­s vont se généralise­r, au point de devenir la norme, la figure imposée. Le long de State Street, colonne vertébrale de la ville, certaines adresses cultivent encore, d’ailleurs, une pointe de nostalgie coloniale. Comme le Kimpton Canary Hotel, qui vous hisse à un mètre au-dessus du sol dans ses lits à baldaquins. Ou le restaurant Finch & Fork, aux vieilles banquettes de cuir patiné, qui sert des plats et cocktails que n’auraient pas reniés les stars du cinéma muet, dont Santa Barbara fut le berceau historique. Le magnifique Hotel California­n, enfin, bel endormi de 1925, revit dans un tout nouveau décor hispano-mauresque signé Martyn Lawrence Bullard, le décorateur des stars. À Santa Barbara, Hollywood n’est jamais bien loin…

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